Quand la visite touristique tourne au marathon.

J'ai pris l'habitude de vous imposer mes compte-rendus de vacances, c'est comme une sorte de soirée diapos deux point zéro. Après Trois enfant à la mer, Trois enfants dans la ville, Trois enfants au Moyen-Âge, Trois enfants dans la zone et Trois enfants à la montagne, je suis certain que vous attendez avec impatience mon feed back sur Paris.
Bon, il y a quand même une excuse utilitaire derrière tous ces articles, c'est de donner des pistes et des solutions pour partir en vacances avec trois enfants et avec un minimum de déplacements en avion et voiture, ce qui est aux antipodes de ce que nous proposent les tour-opérateurs et les lieux touristiques.

Il s'agissait cette fois de profiter d'une occasion improbable pour faire visiter la capitale aux enfants : une de mes pièces de théâtre jouée à Villemoissons sur Orge (91) en plein pendant les vacances scolaires, au printemps. Nous partîmes cinq sans voiture, enfin si, quand même jusqu'à la gare la plus proche, pour arriver jeudi midi à la gare de Lyon, à côté de laquelle nous avions notre hôtel.
Et le choix de l'hôtel, c'est déjà tout un poème. Une chambre pour cinq, ça ne court pas les rues, et nous ne souhaitions pas nous séparer en deux chambres, déjà parce que ça aurait coûté un bras supplémentaire mais aussi parce qu'on aime bien garder un œil sur nos progénitures (pour mémoire : 7, 10 et 13 ans). Alors je recommande aux familles l'hôtel Le Méditerranéen, situé au 93 rue de Charenton (à deux pas de la gare de Lyon dans le XIIème) qui a le bon goût de proposer une chambre à cinq pour la somme rondelette de 199 euros la nuit (sans les petits-déj évidemment, mais nous avions amené de quoi se les faire nous-mêmes par souci d'économie). La chambre est moche et l'immeuble est vieillissant, le robinet est monté à l'envers (le premier soir on se lave les dents à l'eau chaude et on ne le refait plus), mais l'accueil est fort sympathique, et la situation parfaite pour nous.

Nous étions motivés pour profiter au mieux de ces quatre jours à Paris, et nous avions donc planifié un certain nombre de sorties, commandé à l'avance les tickets de métro correspondants et réservé des choses, à commencer par un itinéraire en bus au sein de la capitale, commenté par audioguide et se terminant par la visite du 2ème étage la Tour Eiffel.
Une excellente façon de débuter le séjour en se repérant un minimum dans la ville que j'avais déjà traversé plusieurs fois pour des raisons professionnelles ou touristiques, mais sans jamais avoir la charge d'une famille. Découverte du métro par les trois numéros, ligne M14 automatisée, le bruit, le stress,... je pense qu'ils sont vaccinés d'habiter un jour à Paris.
Au retour, en descendant de la tour Eiffel, nous prenons le Batobus plutôt que le métro, histoire de voir l'envers du décor, depuis la Seine.
Le soir, pour ne pas trop en rajouter avant un lendemain qui s'annonce chargé, nous choisissons un restaurant non loin de l'hôtel, une pizzeria sans prétention dont on ne retiendra pas grand chose.

Vendredi, on commence les choses sérieuses avec la visite du Château de Versailles. Pour s'y rendre, un peu de métro M14 et beaucoup de RER C. A noter que le calculateur de la RATP s'obstine à nous faire prendre le bus, alors que le RER nous dépose tout proche du château. Grâce aux Pass Muséum 4 jours, l'entrée est gratuite (incluses dans le pass) et on peut éviter l'attente aux caisses. Versailles, c'est grand et il faut beaucoup marcher. Heureusement, ce vendredi, pas trop de monde, si ce n'est les inévitables touristes asiatiques dont la psychologie me dépasse totalement. Apparemment, ces gens DOIVENT se faire photographier devant CHAQUE tableau, et se mettre en scène devant TOUS les mobiliers présents dans le château, et ce dans la position la moins naturelle possible (montrant du doigt le portrait d'un noble quelconque, faisant le V de la victoire devant le billard en acajou...). Si quelqu'un peut m'expliquer cette bizarrerie, je suis preneur.
Comme je suis une brêle en histoire, difficile de raccrocher toutes les informations glanées pendant la visite à une réalité historique. J'essaie juste de comprendre le sens de tout ce luxe à cette époque, et à le transposer à la nôtre. Dans les deux cas, j'échoue.
En fin de journée, après avoir arpenté les jardins, le petit et le grand Trianon, le hameau de la reine, il se met à pleuvoir, et les K-way sont restés bien rangés dans les valises à l'hôtel. On est tous fourbus et mouillés avant de reprendre le RER du retour.
Quelques minutes de repos à l'hôtel et nous faisons une croix sur le musée d'Orsay que l'on avait initialement prévu (optimistes) pour cette fin d'après midi. On se rabat sur un musée plus proche de l'hôtel et inclus lui aussi dans la liste du Pass Museum : la cinémathèque ou encore "musée du cinéma".
Il suffit de suivre la Rue de Charenton jusqu'à la rue de Bercy, sauf que la rue de Charenton fait plusieurs kilomètres et que je la prends d'emblée dans le mauvais sens. Il faut bien se représenter la chose: nous avons déjà plusieurs bornes dans les pattes après la visite du musée, les chaussures détrempées de l'averse de l'après midi, les enfants en ont marre, et le trajet jusqu'au musée du cinéma parait tout à fait interminable. D'autant que nous prenons une nouvelle sauce sur le coin du nez, et que l'heure de fermeture du musée que nous visons approche.
Nous y arrivons enfin, sentant le chien mouillé, les jambes endolories, l'air hagard.
Et là, déception. Ce musée est définitivement à mourir d'ennui et à proscrire de tous les guides touristiques. A moins peut-être d'être un ultrapassionné du cinéma d'auteur du début du 20ème siècle, célibataire et désoeuvré, n'y foutez pas les pieds. Surtout pas avec des enfants. D'autant que si l'entrée des adultes est incluse dans le Pass Muséum, figurez-vous qu'il y a un supplément pour les enfants ! 2.50 euros * 3, pour leur faire visiter en dix minutes chrono quelques vieilles caméras et de vieux dispositifs de projection, le véritable costume de Jean Gabin dans "Quai des brumes", et des anciennes pub Gaumont Pathé. C'est ennuyeux à mourir, mal foutu, triste, sombre...
Ce soir-là, éreintés, nous avons juste choisi le restaurant en face de l'hôtel, "Les temps modernes" au 91 rue de Charenton. La bouffe y est correcte, l'accueil très sympathique, mais le courant d'air dans le dos alors que j'étais encore mouillé très désagréable et la note bien trop salée : 120 euros pour 5 personnes !

Samedi, encore une journée bien chargée : on commence par le Louvre, inclus dans le pass muséum, avec coupe-fil qui nous permet d'éviter l'attente dans le froid devant la pyramide. Chose amusante, dès qu'on franchit la porte, et avant que nos billets d'entrée soient vérifiés, les deux files se rejoignent. Autrement dit : n'importe qui qui se présente dans la file "avec ticket" peut couper la file sans problème. La visite du musée gigantesques est longue est parfois assommante, d'autant que les trois numéros sont pas toujours très attentifs, passés le charme de la découverte du début. On notera toutefois l'incroyable collection d'objets égyptiens, de sarcophages, de jeux, d'instruments de musique de l'époque ; et puis la reconstitution des appartements de Napoléon III, qui n'est pas sans rappeler la visite de Versailles la veille, des salles à manger gigantesques, des lits minuscules, ... La Joconde est sans intérêt si ce n'est le fait de pouvoir dire : "je l'ai vue en vrai et c'est sans intérêt". Quelques œuvres célèbres dans le même genre, le radeau de la Méduse (pour le jeu de mot, je m'excuse), Les Noces de Cana, la Vénus de Milo (du nom de l'endroit où elle a été découverte, et non pas d'un sculpteur qui s'appellerait Milo) ...
Après cette visite au pas de course et encore quelques kilomètres avalés en traînant les numéros sur les rotules, on s'accorde un pique nique dans le jardin des tuileries, qu'on partage avec les volatiles du coin. Et on repart tout de go vers la cathédrale Notre Dame, pour en visiter la crypte et monter dans les tours (tout étant inclus dans le pass). Mais devant le monde, on se résigne à ne visiter que la crypte qui explique les découvertes archéologiques qui ont été faites sur place et comment Paris s'est développée à travers les âges.
Il est 15-16h, nous avons rendez-vous vers 20h dans l'Essonne pour assister à la représentation de ma pièce, j'ai perdu le téléphone du gars de la troupe qui m'a invité, ainsi que les indications pour trouver le théâtre, on est vannés. Après avoir parcouru quelques rues commerçantes, on rentre à l'hôtel pour manger rapidement et refaire le point sur l'activité du soir.
D'abord, il faut prendre le métro puis le RER C direction St Martin d'Etampes, ensuite, il faut faire encore 2km à pied, avec la valise remplie de mes romans à dédicacer après la séance, pour trouver la salle de spectacle de Villemoissons/Orge. On arrive vers 20h20, sur les genoux, mais la dame qui vend les billets est tellement lente que c'est bien assez tôt, la pièce ne commence que vers 21h00.
La troupe du "Théâtre de la Tour" a bien progressé depuis l'année dernière et joue "Le contrat de mariage" avec beaucoup de talent. C'est toujours agréable et touchant de voir ses mots faire rire les autres, de penser que des gens ont travaillé le texte pendant des mois. Cela donne envie de continuer d'écrire et de s'améliorer car on perçoit aussi les limites de sa propre écriture, les bons mots qui passent bien, ceux qui sont tirés par les cheveux, les situations trop grotesques ou irréalistes...
Pas loin de 200 personnes qui applaudissent, et je parviens à vendre sous la menace deux romans à des gens qui m'en avaient déjà acheté l'année précédente et qui ont semble-t-il apprécié (ou sont particulièrement hypocrites). A la sortie, le taxi shuttle nous attend. Encore une fois, trouver un taxi pour cinq, avec un réhausseur, un samedi soir à 23h, ce n'est pas fastoche et c'est hors de prix (120 euros), mais je ne me sentais pas de faire le retour en RER, et les kilomètres à pied correspondant en traînant mes trois numéros à bout de bras. La location de voiture était tout aussi onéreuse en plus de compliquer la logistique.

Dimanche, c'est le jour du Palais de la découverte, mon meilleur souvenir. On arrive les premiers sur place, et au final, très peu de gens pour suivre avec nous les expériences à la "C'est pas sorcier" des animateurs sympathiques et compétents. Après avoir touché tout plein de bouton qui actionnent des bidules dans des vitrines, on s'installe pour un exposé sur l'électricité statique où l'intervenant demande des volontaires pour recevoir 300.000 volts dans le corps (et le pire c'est qu'il en a trouvés ! Et ils ne sont même pas morts !), nous assistons ensuite à une séance dans le planétarium où l'on apprend pas grand chose, malheureusement, mais les enfants ont adoré. Exposé sur les arômes et les colorants, je sais maintenant comment fonctionne la numérotation des colorants "E123", "E112"... Après le déjeuner sur place, on résiste à la sieste pour assister à l'exposé sur les ondes et le son, très intéressant lui aussi, puis sur les séismes (moins intéressant), et enfin, un atelier "récréations mathématiques" animé par un mec passionnant et dévoué qui nous explique que la Cité des sciences est en train de bouffer le Palais de la découverte malgré la pétition en cours. L'occasion aussi de redécouvrir les graphes eulériens, j'adorais la théorie des graphes à la Fac, mais je n'en ai pas retenu grand chose :( Bref, un excellent moment, on y est resté 8 heures en tout !
A la sortie, ambiance bizarre, il y a des policiers partout, la station de métro qu'on voulait prendre est fermée. On marche jusqu'à Concorde où, là aussi, la plupart des stations est fermée. Petite angoisse : que se passe-t-il ? Nous n'avons pas écouté la radio ni vu les infos depuis quelques jours, on se demande s'il est prudent de s'enfermer dans le métro avec les gosses (après coup, j'ai appris qu'il s'agissait de mesures de sécurité autour de la manif "anti mariage pour tous", bandes de cons)
On se risque quand même à prendre le M12 pour voir le Sacré Coeur et la place du tertre, en prenant le funiculaire de Montmartre. L'endroit est pittoresque et joli à voir, mais nous ne sommes plus en état de quoi que ce soit. Après un tour rapide du quartier, on rentre dans le 12ème pour trouver un ultime restaurant non loin de l'hôtel, avenue dausménil, Le Viaduc Café, pas mauvais, cadre charmant, et note salée mais pas trop (100 euros pour 5).

Le lendemain (donc hier :) ), on reprenait le train à 6h15, harassés par quatre jours de visites-marathon.
Quelques constats d'ordre général :
- Les parisiens sont des zombies. Dans le métro, ils ne sont plus tout à fait humains, à l'heure d'embaucher, c'est flagrant et ça fout limite les jetons.
- Sur les lieux touristiques et huppés que j'ai fréquentés, je n'ai croisés quasiment que des gens de ma classe sociale, de ma race et de ma couleur de peau. Sauf exception, la misère se cache là où on ne la voit pas, nous donnant l'illusion que tout va bien pendant la crise.
- Les touristes avec enfants ne prennent pas le métro, ou alors ils ne choisissent pas cette période de l'année, mais nous nous sommes trouvés bien esseulés au milieu de jeunes célibataires ou de jeunes couples sans enfant. Très peu de vieux aussi.
- Les parisiens restent dehors quand ils le peuvent. J'ai vu des gens manger en terrasse alors que ça caillait grave ou que les nombreuses voitures crachaient leur gaz d'échappement dans leur bière et dont le bruit couvrait leurs conversations.
- La publicité est omniprésente, j'ai dû voir en cinquante formats différents la promotion du film "L'écume des jours".

Pour toutes ces raisons, moi non plus je ne vivrais pas à Paris.

Commentaires

1. Le mercredi, 24 avril 2013, 14:50 par krka

:( j'avais oublié que tu passais ce week end.

2. Le mercredi, 24 avril 2013, 14:57 par krka

A voir "Si versailles m'était compté" de sacha guitry pour comprendre ce chateau

3. Le mardi, 30 avril 2013, 21:57 par Nath

Si tu as survécu à Paris, je te conseille Londres ;) Très sympa avec les enfants et accessible en train :D
Si jamais l'aventure vous tentait, envoie-moi un petit mail, je te partagerais notre retour d'expérience !

4. Le mercredi, 1 mai 2013, 09:36 par Merome

@Nath : Londres ? Ma pauvre dame... Déjà envisagé, mais compliqué à mettre en oeuvre. On n'est pas des aventuriers nous :)

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