Power loss

Tous les informaticiens blogueurs ont déjà fait un article, ou plusieurs, sur les dépannages qui font leur sacerdoce quotidien. Il se pourrait bien que je l'aie déjà fait aussi, et je ne vais pas recommencer. Mais je suis frappé, récemment, par l'angoisse qui se lit de plus en plus dans les yeux de ceux qu'on dépanne. La technologie est maintenant partout, et la dépendance au numérique, permanente. Du GPS qui nous guide au téléphone portable qui nous sauve, en passant par l'ordinateur qui sert à déclarer les impôts et se tenir au courant. Avant, la panne informatique faisait juste perdre un peu de temps, agaçait, ou faisait simplement passer à autre chose. Aujourd'hui, c'est une question de vie ou de mort.

Paradoxalement, alors que tout le monde baigne maintenant dedans jusqu'au cou, plus personne ne comprend comment ça marche. Personne sauf la poignée d'ados attardés que nous restâmes longtemps (que nous sommes encore ?), moqués par ceux qui à l'âge où l'on drague les filles se moquaient de nos programmes en basic. Juste revanche de la vie : ils doivent maintenant nous supplier de régler leur internet pour télécharger du p0rn, alors que nous sommes passés à autre chose (si si !).

L'informaticien se conscientise à mesure qu'il prend du pouvoir et constate que les autres le perdent. Les sexagénaires (et plus) qui nous gouvernent sont à l'ouest (et à l'ouest, rien de nouveau), et les geeks se mettent à rêver d'une société où la logique brutasse et mathématique se joint à la puissance du réseau social pour prendre de meilleures décisions.
Ainsi, Korben publiait au soir des élections départementales un innocent billet intitulé "10 étapes pour pirater la France". Le genre de truc déjà fait mille fois par tous les déçus du gouvernement représentatif (y compris moi, dès 2005) et qui a été développé par des tas de forums et de blogs dédiés. Mais cette fois, allez savoir pourquoi, ça a pris un peu plus d'ampleur. Oh, c'est pas encore tout à fait la révolution, rassurez-vous, mais dès le lendemain, y avait un wiki, un projet github, un reddit et un compte twitter dédiés au bazar. Rue 89 en a fait un article aussi sec.

Le système politique vacille. Ça va peut-être prendre des années, voire des décennies, mais il n'y a pas d'exemples de modèles société qui survivent à la défiance du peuple. Après tout, en 1789, les marchands et les banquiers qui détenaient le pouvoir du moment ont réussi à foutre en l'air la monarchie qui ne s'est pourtant pas laissée faire. J'espère que les nouvelles élites qui viendront à bout du gouvernement représentatif ne mettront pas en place une société qui les place en seuls maîtres légitimes.

En attendant, la bestiole se défend, et une loi liberticide de plus se profile à l'assemblée. La quadrature du Net est sur la brèche et a déjà pondu la riposte, en nous invitant à y participer. Ce que j'ai fait en alpaguant nos députés par mail, j'ai déjà obtenu quelques réponses :

Vous évoquez une "surveillance de masse"...mais dans le projet de loi il ne s'agit pas de cela. Les opérations que vous contestez ne concerneront que des individus ciblés... d'ailleurs il serait "matériellement" impossible d'agir autrement et aussi complètement "improductif".

Le texte sera très sérieusement amendé de sorte que les garanties et contrôles soient apportés. Nous avons pesé sur ces points majeurs. Il faut trouver l'équilibre entre l'efficacité et la garantie des libertés individuelles.

Attendez que le texte soit examiné au moins ! Nous en débattons en ce moment ....

Je vais voir s'il est utile d'argument plus loin en leur répondant à mon tour. Mais je vous invite à faire de même, par mail, par téléphone, histoire de montrer qu'on n'est pas insensible à ce qui se trame.