Et comment ?

Suite à ma participation à l'atelier constituant de Mulhouse, et à certaines expériences personnelles et familiales, je m'interroge sur la meilleure façon d'émanciper les individus. Comment susciter chez mes proches, mes enfants, l'envie de découvrir et d'apprendre par eux-mêmes ? Comment leur donner la confiance nécessaire pour qu'ils surpassent leurs maîtres et s'en émancipent ?

Je me rends compte sur le tard que l'école, malgré tout le bien que j'en pense par ailleurs, peut être un instrument d'asservissement d'une puissance effroyable. Si l'on se contente d'apprendre ce qu'on nous enseigne, alors on ne produit jamais rien de nouveau. Qu'est-ce qui fait qu'un jour, un individu se sent suffisamment libre et compétent pour inventer autre chose ? Pour aborder un sujet sans se référer à un maître ?

Quand, sur certains sujets, je suis dans la position du sachant (en informatique, sur la création monétaire, ...), je ne sais pas comment éviter d'être un simple donneur de leçons (au sens premier) et permettre à ceux qui m'écoutent d'aller au-delà de ce que je leur dis. Comment susciter leur désir d'en savoir plus ? D'aller chercher eux-mêmes l'information aux sources qu'ils auront sélectionnées selon leurs critères ?

J'oscille entre deux comportements extrêmes qui ne fonctionnent pas (avec mes enfants, par exemple). Soit je les laisse se débrouiller seuls, mais souvent, ils restent bloqués et sont insuffisamment motivés pour se sortir eux mêmes de leur problème. Soit je fais à leur place et les empêche de commettre leurs propres erreurs. Le processus qui m'a permis d'intégrer une technique, une notion, de mémoriser une information, je suis incapable de le décrire pour qu'ils le reproduisent.

Si vous avez de la lecture à me conseiller à ce sujet (j'ai lu "Le maitre ignorant" de Jacques Rancières par exemple et je n'ai pas pu en tiré grand chose), ou des retours d'expérience, ça m'intéresse grandement.

Commentaires

1. Le lundi, 2 mars 2015, 13:16 par Galuel

On ne peut pas aller au delà de A sans avoir préalablement acquis la maîtrise de A.

Et par ailleurs on ne peut pas prétendre non-plus maîtriser A, sans être déjà dans un au delà de A. Car pour contempler un objet, il faut être au delà de cet objet, sinon on ne l'aperçoit qu'en partie (un observateur dans une boîte ne peut avoir qu'une information partielle sur la boîte, du fait qu'il en fait partie).

Comment comprendre ceci avec toute la profondeur nécessaire ?

On peut par exemple étudier les textes suivants :

- "Gödel" de Pierre Cassou-Noguès.
- "Se libérer du connu" de Krishnamurti.
- "L'enseignement de Râmakrishna" traduit par Jean Herbert.
- "Le Bodhisattvacharyavatara" de Shantidéva

2. Le samedi, 7 mars 2015, 09:48 par G capiaca

Ton article me parle totalement !
Si ça peut te rassurer ton blog est à compter parmi ceux qui m'ont donné envie d'aller voir plus loin au sujet du revenu de base :-)

Après je suis quelqu'un qui à une soif d’apprendre depuis l'école et qui n'a cessé depuis de lire et "stocker" ces savoirs sous différente formes de manière boulimique.

Sinon je me retrouve avec le même problème que toi... quand un ami me fait la réflexion qu'il trouve bizarre que je m'intéresse à l'économie (je suis dépanneur informatique).
Quand je partage des articles qui me semblent capitaux sur Facebook et que je vois 2 ou 3 personnes aimer ou repartager alors que d'autres contacts partagent des images pleines de bon sentiments mais vide d'intérêt ou des vidéos "drôles".
J'ai quand même conscience que Facebook est plutôt un lieu de défoulement que de partage de connaissance mais ça m'exaspère...

Ce qui fait peur quand même c'est quand on parle de choses un peu complexe on a parfois des réactions du genre "c'est prise de tête donc pas digne d'intérêt". J'ai une amie qui appelle même son mec Wikipédia et qui nous a souvent fait la réflexion: ça vous sert à quoi de savoir ça ?

Le fond du problème, pour moi, c'est qu'on est dans une époque où tout doit être utilitaire pour être digne d'intérêt et ça ne date pas d'hier, je me rappelle encore des réflexion du type dès le collège: "à quoi ça va me servir de savoir le théorème de Pythagore ? je vais avoir un métier avec ça ?".

Bref, je suis dans la même recherche....
Pour finir sur du positif, j'ai vu des méthodes récentes qui ont l'air d'avoir un impact: une histoire avec un père et son fils qui avaient inventés un système pour recueillir le miel produit par les abeilles sans les déranger.
L'info diffusée sur facebook via une image et un texte dans l'image "ils recueillent le miel sans déranger les abeilles" ou un truc du genre. L'histoire à l'air de s'être tellement diffusée qu'ils ont réussi se financer pour en fabriquer d'autres.
Une info percutante, visuelle qui interpelle. Peut être une piste ?

3. Le mardi, 10 mars 2015, 11:53 par Tritone

Hello !
Une piste expérimentée avec mes enfants et ceux que j'ai croisé : être passionné et donc .. passionnant !
Que ce soit pour les tritons ou le jardinage, peu importe.
On va voir un film parce que celui qui nous en a parlé avait des étoiles dans les yeux en nous le racontant. On va écouter un concert ou découvrir un livre, parce qu'on nous l'a bien "vendu".
On a tous en mémoire un prof qui nous a fait aimer l'histoire ou les maths.
Et en plus, être un exemple "passionné", même si ça fait rire parfois, ça encourage à ne pas se contenter de zapper depuis le canapé.
Mes enfants aujourd'hui "grands" me disent si souvent "oui mais c'est ta "faute" si on est curieux" que je me dis qu'il doit bien y avoir un fond de vrai là-dedans .
Donc pour moi la nuance entre passionné et barbant, c'est qu'on est, plus qu'on ne dit.
Bien sûr, si on est bavard en plus ... ^^

4. Le mardi, 10 mars 2015, 14:48 par Merome

@Tritone : Effectivement, la passion est un puissant moteur qui fonctionne très bien... pour ceux qui sont déjà curieux. Les autres y voient de la déraison, voire de la bêtise.

5. Le jeudi, 11 juin 2015, 15:27 par frad

Je rejoins Tritone sur la passion quelque soit le domaine.

J'ai enseigné le jeu d'échecs à des enfants (en général volontaires tout de même pour l'activité).
Trop souvent, je tenais à leur expliquer les choses "scolairement" : résultat : bof bof.

Par contre, en racontant des anecdotes, en racontant des histoires, en les félicitant, en les encourageant, en étant toujours positif, en ne disant pas "je sais" "vous ignorez", en répondant parfois "je ne sais pas" à leurs questions, bref : en partageant ma passion de façon vivante et surtout en les rendant un maximum actifs, en les encourageant : résultats bien meilleurs ! Surtout sur le long terme.

Ma tite méthode ABC :

A comme Actif !
Eviter au maximum la théorie et aborder tout de façon à ce qu'il soient actifs.
Ne serait-ce que par ex ne pas répondre à une question mais faire découvrir/chercher la réponse.

B comme Bravo !
Tout effort ou avancée doit être encouragé. Les enfants y sont sensibles et les adultes aussi.

C comme Calme !
Keep cool et prendre le temps. Ne pas s'énerver.
Parfois pas toujours évident :)

Bon après c'est sûr que si le domaine rebute complètement l'enfant : c'est pas facile.
Mais en général avec pas mal de Bravos au départ : ça le fait.

6. Le jeudi, 11 juin 2015, 15:42 par frad

Apprendre aux autres c'est aussi un échange.
Je n'ai jamais autant progressé dans le domaine des échecs que lorsque je l'enseignais aux enfants.

Parce que bien souvent leurs questions m'ont fait vérifier des connaissances (dont j'étais certain et qui se révélaient fausses). Bien souvent ces questions sont loin d'être bêtes et sont très justes, pertinentes, profondes parfois.

Donc aborder le truc en se disant : ils vont aussi m'apprendre des choses : c'est plus chouette.

Faire des pauses aussi. Prendre le temps. Vaut mieux aller lentement tranquillement.

Puis chacun sa façon de transmettre aussi :)
Y trouver et y donner du plaisir.

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