La mondialisation et la crise devraient-elles nous empêcher de penser à des solutions alternatives ?

Lorsqu'on évoque la décroissance, ou même plus simplement des projets de société qui ne cadrent pas avec le modèle dominant, on se voit souvent opposer le même genre de non-argument. Dans une économie mondialisée, et compte-tenu de la crise, pensez-donc mon bon monsieur, il n'y a pas d'autres alternatives.

Fort heureusement, nos ancêtres n'ont pas toujours été aussi lâches, et ont-il pris quelques bonnes décisions en faisant fi du qu'en dira-t-on.
Par exemple, comme Stéphane Hessel le rappelle dans son livre, la sécurité sociale a été inventée au lendemain de la seconde guerre mondiale, alors que le pays était ruiné par la guerre.

Que je sache, il n'a pas été besoin d'attendre que les autres pays s'y mettent pour se lancer dans le projet. Il s'agissait avant tout de poser les bases d'un fonctionnement juste et légitime, sans se poser la question de son adoption ou non par les pays alentour. Plus récemment, les Allemands ne nous ont pas demandé notre avis pour mettre en place une sortie progressive du nucléaire, avec plus ou moins de succès, mais la question n'est pas là. Aujourd'hui, on a tendance à évaluer les politiques publiques exclusivement à la lumière de la compétitivité internationale et de l'efficacité économique.

L'abolition de l'esclavage, la fin du travail des enfants, l'introduction de la notion de congés payés... sont autant de choix qui n'avaient rien d'intéressant économiquement. C'était même au contraire se priver de main d'œuvre bon marché sous le seul prétexte humaniste.

Les nations les plus développées aujourd'hui, celles qui restent les plus riches et où l'espérance de vie est la meilleure sont précisément celles qui ont fait ces choix économiquement aberrants, mais courageux.
N'y a-t-il plus personne aujourd'hui pour proposer ce type de projet de société ? Sommes-nous condamnés à ce nivellement par le bas perpétuel sous le prétexte de la compétitivité économique ?

Ne suffirait-il pas de proposer un modèle complet cohérent, au lieu d'évaluer chaque mesure toutes choses égales par ailleurs. Il est vraisemblable qu'on ne puisse pas aujourd'hui financer une nouvelle réduction du temps de travail, comme le propose Michel Rocard, ou la gratuité des transports en commun. Cela n'est possible qu'au prix de profondes mutations de nos sociétés qu'il ne faut pas craindre. Rien ne nous oblige de faire les mêmes choix que nos voisins. En revanche, il est indispensable de rester cohérent par rapport à nos propres choix.
Acceptons que les riches soient moins riches pour que les pauvres soient moins pauvres. Cessons de nous cacher derrière le petit doigt de la mondialisation pour éviter de changer une société pourtant notoirement déficiente. Arrêtons de nous trouver de fausses excuses pour ne pas faire les réformes que l'humanisme, et non le marché, nous impose.

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