Incroyablement, je ne suis pas resté longtemps sur le "marché" des célibataires. À 17 ans et des bananes, je me casais définitivement avec celle qui allait devenir mon épouse, et 23 ans plus tard, j'en suis toujours et heureusement encore là.
Tout le monde n'a pas ma chance, chance que je mesure pleinement quand j'observe mes congénères d'un âge certain qui commencent à paniquer à l'idée de rester seuls.
Je fais partie d'une ou deux assoces qui organisent parfois des sorties ludico-sportives. L'autre jour, c'était un truc plutôt masculin, genre paintball ou course de karts. Cela n'a pas empêché plusieurs filles de participer, non pas, visiblement, pour le goût de se foutre sur la gueule ou de faire l'intérieur à l'adversaire (c'est une métaphore de course automobile, n'y voyez aucune allusion sexuelle), mais bien pour cultiver une vie sociale sans laquelle tout espoir de trouver un partenaire s'envole irrémédiablement.
Il y avait là une ou deux paires de trentenaires dont le poids de la solitude se lisait sur le visage. Différemment chez les filles que chez les garçons par ailleurs. Les mecs sont plutôt blasés et mettent en avant leur côté viril, les filles ont sorti leur plus belle jupe et le maquillage particulièrement mal appropriés pour l'activité proposée.
On se connaît sans se connaître, on fait juste partie de la même association, on se croise régulièrement, mais sans plus. Avant de commencer l'activité, il y a un round d'observation où chacun évalue les forces en présence. Qui est libre ? Celui-ci est venu sans sa femme, est-ce un signe ? Une occasion à saisir ? Celle-ci a sorti le pire truc de sa garde-robe et son rouge à lèvres écarlate m'as-tu-vu, est-elle à ce point morte de faim ?
Puis on commence le jeu, la course, la compétition. Il y a la fille qui surjoue son côté "je suis nulle", ça lui fait au moins un truc à dire, une spécificité, même si elle risque de passer pour une cruche définitivement. Les mecs mettent leurs couilles sur la table, ils ont pulvérisé tout le monde et sortent les muscles. Les moins chanceux exhibent au contraire leur côté féminin, leur fairplay et admettent un côté "soumis" qui pourrait plaire à certaines de leurs adversaires.
L'activité se termine, on boit un coup. Ceux qui sont en couple ne restent pas longtemps. La femme / le mari et les gosses l'attendent à la maison. Les autres pinaillent encore quelques heures mais rien de sérieux ne semble se tisser. Encore un coup pour rien.
L'horloge biologique tourne de plus en plus vite, c'est implacable. Après 35-40 ans, ça devient difficile d'envisager une première grossesse sans risque, les filles sont donc plus à cran. Le pire scénario pour elles : se faire larguer vers 30-35 balais après une histoire bien longue de plusieurs années, sans enfant. Observez les filles dans ce cas : elles fondent à vue d’œil. Elles perdent plusieurs kilos en quelques mois et se métamorphosent socialement. L'angoisse de la solitude est à son paroxysme et elles se conforment à vitesse grand V à l'idéal féminin tel qu'elles le perçoivent. Décolletés, sourires et maquillage, "non, c'est pas parce que je suis chiante que je suis seule", crient-elles silencieusement et pathétiquement.
Les hommes dans le même cas ne font tant d'efforts. Au contraire, ils croient profiter de leur liberté retrouvée en buvant de la bière et en allant au match. Ils espèrent secrètement qu'une angoissée nullipare leur mette le grappin dessus mais restent passifs. Ou alors, romantiques, ils sont totalement déprimés et déçus par la gente féminine au point de ne plus envisager positivement une vie de couple.
Le pire c'est qu'on ne peut même pas les aider. On ne peut qu'observer les ravages du temps sur leur stabilité émotionnelle. C'est triste.
Commentaires
Un tableau drôlement bien observé. Oui c'est triste.
La peur me semble l'élément central.
- Peur de la solitude
- Peur de déplaire
- Peur d'être en couple
- Peur de l'échec ou d'un nouvel échec
- Peur de ne pas être dans "l'idéal social"
- Peur de ne pas avoir d'enfant
- Peur d'en avoir
- Peur de vieillir
- Peur de l'avenir
etc.
On entend souvent dire le truc :
"On rencontre quelqu'un quand on ne s'y attend pas"
Il y a sûrement un quelque chose de vrai là-dedans dans la mesure où, dans la surprise, des peurs peuvent être dissipées.
C'est un problème de nos sociétés modernes. Il est récent à cette échelle et on ne peut pas dire qu'il y ait un profil bien défini de la personne célibataire : ce qui pourrait être d'ailleurs une peur supplémentaire
Au japon, je crois que c'est le ponpon pour ça. J'avais vu un documentaire effectivement d'une tristesse mais d'une tristesse : oulah