Couverture Transport Universelle

Ne cherchez pas l'acronyme, je viens de l'inventer, tout comme le concept qu'il sous-tend.
À la base de cet article-réflexion qui n'a d'autre intérêt que de frapper les esprits, une image, trouvée au hasard de mes pérégrinations sur le web :



Cela concerne les voitures américaines, mais les ordres de grandeurs doivent être sensiblement les mêmes en France : nos voitures sont inutilement garées 96% du temps. Elles ne servent à rien. Un ami m'a fait remarqué que c'était le cas de nombreux objets de la vie courante et il citait l'exemple du four à raclette, qu'on sort deux fois par an à tout casser. Ce n'est pas faux, mais la différence entre une voiture et un appareil de petit électroménager, c'est le prix ! Au bas mot, 100 fois plus cher à l'achat, sans compter l'assurance, le carburant et l'entretien.

Doit on se contenter d'une situation où des millions de voitures sont inutiles ? Dans un monde infini, gavé de ressources, et des richesses à profusion, pourquoi pas. Mais nous sommes précisément en pleine crise, nous manquons d'énergie, de matières premières et déjà celles que nous transformons et utilisons causent des dégâts irréversibles. Il y a donc matière à réfléchir, même si rien ne sera jamais parfait. Sauf à considérer que notre société va inévitablement se perdre dans l'inefficacité maximale, pour soutenir un modèle moribond, c'est une théorie développée chez Ploum récemment, je vous invite à lire ça.

Ceci en tête, alors que je me demandais en passant l'aspirateur combien de temps il passait relégué au placard, j'ai pensé à cette histoire de CTU. Et si prendre le taxi et les transports en commun était remboursé par la "Sécurité Transports" ?
Au moment où j'écris ces lignes, mes deux voitures sont bien à l'abri dans mon garage, parfaitement inutiles. Pourtant, elles me coûtent un bras et leur fabrication a nécessité de l'énergie et des ressources qui pourraient être bien mieux affectées, sans doute. S'il était possible et pas totalement idiot financièrement d'appeler un taxi quand j'en ai besoin, de prendre un bus régulier (il n'y en a pas dans ma campagne profonde), je le ferais bien sûr, et je gagnerais 40 m² de place dans ma baraque, entre autres.

Bon, vous allez me dire : "comment on finance ça ?", "et si tout le monde fait ça, comment les taxis vont pouvoir répondre à la demande ?", ... Et vous aurez raison, ce n'est sans doute pas une façon très réaliste d'aborder le problème. Je voulais juste amorcer une réflexion et vous mettre la puce à l'oreille.

Ça ne vous dérange pas, vous, d'avoir dans votre garage un bidule à 96% inutile qui coûte 10.000 euros ?

Commentaires

1. Le vendredi, 15 août 2014, 19:59 par viconte

Voiture utile à 4% seulement !

Si on pousse le raisonnement à la limite, et si on imagine un système qui permettrait à tous de partager des véhicules afin de les utiliser à 100%, ca signifierait que 96 % des véhicules sont inutiles...

PSA, au lieu de fabriquer 3 millions de véhicules par an, serait réduit à en fabriquer 25 fois moins, soit plus que 120 000 ! Autant dire que tu fermes les 2/3 de Sochaux, et toutes les autres usines PSA dans le monde (je donne cet exemple, car je sais que tu es de la région mais ce n'est peut-être pas Sochaux qui serait conservé)

Tout ca pour dire que notre système repose sur la consommation, et que si tu rationalises cette consommation, tout s'effondre...

Bref, payer un truc qui sert au moins 4% du temps, c'est pas si mal finalement :)

2. Le samedi, 16 août 2014, 09:28 par Bob

Un intérêt majeur de la voiture est de disposer d'un moyen de transport en bas de chez soi quand on en a besoin : la disponibilité, la fiabilité et le maillage des transports en commun ne conviennent pas aux besoins de chacun et le vélo ne fonctionne que sur certaines distances et pour certains besoins - ce n'est pas à toi que je vais apprendre ça ;)

Or il se trouve que les besoins de transports auxquels la majorité d'entre nous consacre sa voiture sont vraisemblablement les mêmes pour tous et notamment au niveau des horaires : partir au boulot le matin, revenir le soir, faire les courses quand on peut, déplacer les gamins... tout ça sensiblement aux mêmes horaires. Donc on ne peut pas facilement transformer 20 voitures utilisées à 4 % en une seule voiture utilisée à 80 %.

Le covoiturage peut aider dans une certaine mesure mais on se retrouvera toujours tôt ou tard dans une situation où on aura besoin de la voiture du voisin en même temps que lui mais pas pour faire la même chose.

Dans le même ordre d'idée : votre outillage (électrique ou non), vous vous en servez souvent ? ;)

3. Le samedi, 16 août 2014, 11:24 par Merome

@viconte : c'est typiquement le genre d'argument que je ne peux plus entendre. On ne peut pas réduire la part du nucléaire parce que ça détruit des emplois, on ne peut pas réduire le nb de voiture parce que ça détruit des emplois... C'est reconnaître qu'on crée des emplois mortifères, et qu'on aime ça. A la limite, cet argument est valable pour dire qu'on ne peut pas le faire en 5 minutes sur un coup de tête, mais pas pour refuser de tendre lentement vers une solution idéale.

@bob : je vois un paradoxe dans ta réponse. On utiliserait tous la voiture aux mêmes heures pour le même trajet, mais les transports en commun n'ont pas un maillage correct. Pourtant l'équation a l'air simple : toutes les banlieues périurbaines se rendent en centre ville pour bosser. Il faut donc des lignes régulières qui font ça. Et chez moi, par exemple, c'est hors de question parce que la collectivité où se trouve mon village et celle où je vais travailler sont différentes. Donc réseau de bus différents, voire concurrents.
Tu parles du matos électrique, c'est pareil que le four à raclette : ça coute trois fois rien et ne pollue presque pas. La voiture, c'est un des premiers budgets et une des premières nuisances. Ca me semble difficilement comparable.
Maintenant, tu soulèves le problème du partage d'une ressource dont on a tous besoin en même temps. SI effectivement, on ne peut pas réduire le truc à un problème purement mathématique, il n'en reste pas moins que des économies d'échelle sont possibles.

4. Le samedi, 16 août 2014, 14:38 par Bob

Oui, l'équation pour les transports en commun semble simple mais tu illustres toi-même que la réalité est plus complexe que ça, a fortiori quand on n'est pas collé aux agglomérations. J'avais regardé ce genre de détail quand on avait cherché une maison : en dehors de l'agglomération elle-même, vouloir utiliser les transports en commun impose des contraintes très fortes, notamment en termes d'horaires - et donc de proximité par rapport aux accès à ces transports. Ça complique très vite les choses.

Et encore, on ne prend que le cas facile de la personne qui va à son travail toute seule mais en vrai beaucoup de gens ont plus de contraintes que ça. Par exemple, avant mes gamines j'allais bosser en bus, c'était facile : j'ai un arrêt à l'entrée de mon quartier et la ligne me dépose à cinq minutes à pied de mon bureau, voire pile devant si la correspondance va bien.

Aujourd'hui tous les matins je dois en poser une à l'école et une à la crèche avant d'aller bosser et faire le trajet inverse tous les soirs avec une contrainte horaire en prime le soir (fermeture du périscolaire à 18 heures). Bien qu'étant en zone complètement urbaine, aucune combinaison de bus ne réalise cette desserte particulière dans un délai qui me permettrait de mettre un temps de présence raisonnable au bureau.

Je pourrais éventuellement envisager une remorque à gamines pour le vélo quand il fait beau, ça me ferait de l'exercice avec 35 kilos à tracter, encore que l'accès à l'école n'a pas trop été prévu pour ça.

Donc au final : sauf à refaire toute l'organisation de la société (temps de travail, prise en charge des gamins pendant et hors du temps scolaire, etc), c'est bagnole...

5. Le samedi, 16 août 2014, 14:50 par Bob

Je précise parce que c'est pas explicite : oui, je crois moi aussi que des économies d'échelle sont possibles. Mais ce n'est possible que par des actions politiques d'envergure, pas par des choix individuels qui ne vont fonctionner que pour des cas souvent très particuliers et qui cumulent un nombre inhabituel de "bons" facteurs.

Par exemple dans mon cas j'ai pourtant tout - maison, boulot, école, crèche - dans un périmètre restreint (3 ou 4 km de rayon, à la louche : 8 km de trajet au total) et un travail dans lequel on me laisse une très grande souplesse horaire, mais si je voulais faire mon trajet quotidien en vélo, ça me ferait arriver au boulot à 9h30 et repartir avant 17h00. Si on enlève un temps de pause pour midi, ça commence à faire de la journée de travail très courte...

Donc même avec une "bonne" configuration, difficile pour moi d'éviter la voiture si je n'ai pas d'infrastructures et des horaires mieux adaptés à chacune des étapes du truc.

6. Le samedi, 16 août 2014, 19:17 par Merome

@Bob : je suis assez d'accord avec ce dernier commentaire : il faut maintenant de vrais choix politiques pour accompagner une prise de conscience et des changements de comportements des consommateurs. C'est même tout l'objet du billet. En l'absence de tels choix, les choses ne vont aller qu'en se compliquant : la productivité qui monte, les ressources qui diminuent, l'équipement des ménages étant ce qu'il est, on ne retrouvera pas la croissance de sitôt, et tant mieux pour le climat. Donc, tant qu'on reste dans une logique "travailler plus" en espérant retourner la vapeur, on ne fera que se compliquer la vie pour aucun résultat. Il faut remettre à plat tout le bouzin et se poser les bonnes questions. Ou alors, creuser des trous.

7. Le samedi, 16 août 2014, 19:22 par toto

(ouf ca va, j'ai pas d'garage, et elle coute vraiment pas 10000 euros (j'suis tellement sauvée ;) )

8. Le samedi, 16 août 2014, 19:39 par Jeff Renault

J'ignorais que ce fut à ce point ! Génial ça, merci :) Ça va en amener plus d'un à réfléchir à ses contradictions.

@vicomte > je complète la réponse de Merome. Comment peux-tu valider l'absurde par l'absurde ? Ce n'est pas bien parce que ça alimente un système à bout de souffle ; ça démontre que c'est le système qui est foireux. Poursuis ta logique et tu clameras que les guerres sont quand même une aubaine pour le PIB (c'est le cas). Alors vive la guerre ! Franchement, on est mal barré avec des raisonnements dans ton genre (raisonnements dominants au demeurant : bravo, tu es dans le camp des tenants du dogme économique ; vive la croissance, vive le PIB). Comme Merome, je sature avec ce genre d'arguments. Désolé.

9. Le dimanche, 17 août 2014, 11:15 par Le Monolecte

Nous avons des voitures parce que l'organisation spatiale des villes et villages nous l'impose : il y a 50 ou 60 ans, la plupart des activités d'une personne étaient dans un périmètre facilement couvert à pied. Les gosses allaient à l'école seuls et à pied, même au bled (au pire avec le ramassage scolaire - donc, on peut bien ramasser tout le monde partout et à la même heure si l'on veut), les parents allaient au boulot et aux courses à pied, voir la famille en bus ou en train. Maintenant, nous avons des quartiers d'habitation périphériques sans aucun commerce ou service et où l'on n'a même pas pris la peine de construire des trottoirs, les commerces sont dans d'autres périphéries non desservies, pareil pour les zones d'activité où l'on doit travailler.

Dans ma cambrousse, la tension du carburant est encore plus forte : les boulots sont souvent à 60-70 km du domicile, l'école primaire à 10 km, les courses à 18... Le collège à 25, le lycée à 50, la fac... dans un autre monde.

Déjà, il y a des gens qui ne gagnent pratiquement plus assez d'argent pour se payer le trajet vers le boulot... et quand j'en parle aux élus... ils s'en foutent!

10. Le samedi, 23 août 2014, 20:42 par viconte

@Merome et Jeff Renault (le bien nommé ;) )

hé, vous emballez pas : on est tous d'accord... dans l'absolu !
La société de consommation, c'est bien une société de cons.

Maintenant, vous ne voulez plus entendre cet argument, c'est bien. Mais au final, ca change quoi ?

Qui de nous a raison ?

Moi, je n'ai pas d'argument, je constate. Je constate que les consommateurs sont la majorité de la population, que si ils se mettaient d'accord, ils pourraient avoir le pouvoir absolu de tout faire. Et qu'est ce qu'on voit ?

Des veaux.

Chacun pour sa gueule.

Suffit que PSA sorte un nouveau modèle tous les 6 mois, et tout le monde se sent obligé de changer de bagnoles sans arrêt !

Allez-y, prenez votre bâton de pèlerin, et allez prêcher la bonne parole... Je vais au boulot à pied tous les matins et la plupart de mes collègues me prennent déjà pour un extra terrestre qui a bien de la chance de pouvoir consacrer tout ce temps rien que pour aller bosser. Alors, vendez leur, en plus, qu'ils vont probablement perdre leur job ! Bien du courage...

Vous avez une idée du nombre d'emplois en France, qui dépendent directement ou indirectement de l'automobile ? 25 % ? 30 % ?

Vous attendez des actions des politiques ? Mais qui payent leurs campagnes ? ILS NE FERONT RIEN, car ils ne mordront pas la main qui les nourrit...

Et si demain on arrivait à faire table rase de tout ca, n'importe quoi pourrait arriver, car malheureusement, y'aura toujours un nouveau salopard pour prendre la place de ceux qui nous mettent dans le mur aujourd'hui.

Vous avez raison sur un point : vous y croyez encore, alors continuez...

... mais bon, je continuerai à vous lire et je fermerai ma gueule dorénavant :)

11. Le vendredi, 29 août 2014, 16:11 par Nath

On ne peut pas déléguer aux politiques 100% de la décision. Quand bien même ils se mettraient en 4 pour mettre en place des transports en commun performants et accessibles à tous, faut-il encore que les gens révisent leur façon d'aborder les trajets et leur organisation.
En ce qui me concerne, je ne vais pas la ramener sur ce sujet, car j'habite en ville et je prenais la voiture tous les jours pour aller travailler. Question de flemme bien sûr et c'est tellement plus souple !
Et pourtant, j'habite à la périphérie d'une des villes les plus plates de France, avec un réseau de pistes cyclables impressionnant, le tram, des bus, autolib et un maire écologiste...

Il a fallu que ma voiture arrive en fin de vie (puis que je me fasse rentrer dedans, paix à son âme métallique), pour que je commence à regarder comment m'en passer. C'est tout à fait possible en ce qui nous concerne, mais ça demande un effort. Et tous les transports en commun du monde n'y changeront rien.

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