Les nouveaux engagés

Je n'ai pas lu Marx, je n'ai jamais foutu les pieds dans une manif, je n'appartiens à aucun parti politique, je ne suis pas syndiqué, je ne suis même pas un sympathisant fixe, ... Cela ne m'empêche pas d'avoir un certain niveau de conscience politique, acquis notamment sur le net.

Je suis allé voir Bernard Friot il y a deux semaines, j'ai déjà parlé de cet homme ici, cet économiste aborde les choses d'une manière qui permet de faciliter les prises de conscience. Mais son discours se heurte, on dirait, à une barrière idéologique liée au parti dont il est membre : le PCF. Ainsi voit-il tout sous l'angle de la lutte des classes, et n'imagine-t-il jamais les choses autrement que par un rapport de force électoral ou syndical.

Je lisais également récemment Ruffin, son avis sur Chouard, intéressant, mais lui aussi, à un degré moindre que Friot, persuadé qu'il faut faire ses classes avec les syndicats, dans la rue, et connaître ses classiques, notamment "Le Capital". Et puis, pour revenir à Chouard, qu'on ne peut pas "parler à tout le monde", comme si l'on pouvait construire une alternative politique sans être capable de convaincre les partisans de tel ou tel parti de son bien fondé.

Je pense qu'émerge, grâce au web entre autres, une autre forme de contestation et de critique politique. La plupart de ceux que je côtoie sur le web se méfie des partis et des syndicats comme de la peste. Cela complexifie la mobilisation concrète, et on voit que les mouvements anonymous et occupy peinent à déplacer les foules pour leurs actions IRL. Mais la liberté qu'offre cette prise de conscience atypique n'a pas de prix, et permet d'imaginer d'autres moyens d'actions, une contagion virale des idées révolutionnaires à tous les étages de la société. Le cadre sup' qui découvre l'arnaque de la création monétaire, le chef d'entreprise qui se rend compte de la mystification de l'élection ne sont plus des "traîtres à leur classe" (expression que l'on peut lire dans le dernier Fakir, le journal de Ruffin).

Le rapport de force, dans cette configuration, change d'un coup : d'une partie de la classe ouvrière contre le reste du monde, on passe aux 99% contre les 1%. Il manque juste une "conscience de classe", transposée à ce nouvel équilibre et c'est là que le web intervient rapidement. Quand je débats sur un forum ou dans les commentaires d'un blog, je me moque bien de savoir si mes interlocuteurs sont chômeurs, paysans, ouvriers ou PDG, je m'en moque, et je l'ignore. La connaissance de chacun est ainsi partagée sans entrave et sans honte et naissent de ces débats des ébauches d'un système politique et économique qui satisferait le plus grand nombre, et pénaliserait grandement une certaine élite qui profite aujourd'hui honteusement de sa position de force usurpée.

J'ai la faiblesse de croire qu'une fois qu'on aura cette conscience collective d'être le plus grand nombre à être d'accord sur l'essentiel, il n'y aura même pas besoin de violence pour imposer notre point de vue. Les 1% ne prendront pas les armes dans un sursaut d'orgueil désespéré, ils seront vaincus de toute façon.

Commentaires

1. Le mardi, 29 octobre 2013, 14:18 par Calcoran

Mouais ... je suis malheureusement beaucoup plus pessimiste. Certes, le 1% ne prendra pas lui même les armes. Mais il restera toujours quelques pour-cents qui n'atteindront pas la conscience collective dont tu parles et seront heureux de prendre les armes dès que le 1% le leur demandera.
( http://www.youtube.com/watch?v=edfc... )

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