Balayer devant sa porte, la paille, la poutre et tout ça.

Imaginez un chef d'entreprise qui fait travailler ses employés dans un local isolé à l'amiante, sciemment, en toute connaissance de cause. Scandale, enfer et damnation, salaud de patron, exploiteur... Et tout ça en faisant du bénéfice, comble de l'horreur. Et en plus il explique qu'il n'a pas de sous pour construire un nouveau local ou rénover celui-ci. Ah, il ne manque pas de toupet.
On imagine sans peine le traitement médiatique qui serait réservé à ce genre de nouvelle, et la vive désapprobation de l'opinion publique.

Maintenant, imaginez que l'on apprenne tout d'un coup que le diesel est cancérigène, et que l'exposition de nos propres enfants aux microparticules provoque des maladies potentiellement graves. Cette même opinion publique se dépêcherait-elle de laisser sa voiture au garage ou de la changer pour une plus saine ?
Non, nous continuons bêtement de réduire l'espérance de vie de nos enfants, en les faisant respirer du diesel, bien sûr, mais aussi dans des tas d'autres circonstances (peintures au benzène, biberons au bisphénol, OGM, légumes pleins de pesticides, pulvérisation de Round-Up autour de la maison...). Et on invoque le même genre d'excuses bidon : on n'a pas assez de sous, il n'y a pas de solution, ... tout en partant en vacances tous les ans à grand frais, en s'achetant des télés toutes plates et en montant le chauffage.

Ce qui fait que le chef d'entreprise est un salaud, que l'élu est corrompu, ou que le parent est inconscient, ce n'est pas l'homme ou la femme qui est derrière. Ce n'est pas davantage un complot des illuminatis. Ce qui provoque ceci est... un système mal foutu. Un système qu'on s'est donné nous-mêmes, qu'il nous appartient de changer. Mais pas à la marge, pas en interdisant l'amiante ou le diesel, en agissant au coeur du problème, ce qui fait qu'à un moment donné, nous agissons pour un bien être à court terme, sans responsabilité vis à vis des générations futures et vis à vis d'autrui.

Quand on commencera à admettre que si les choses vont mal ce n'est pas à cause de Sarkozy, à cause de Hollande ou à cause de Liliane Bettencourt ou Bernard Arnault, mais à cause du système qui leur permet d'arriver là où ils sont, nous aurons fait un grand pas.

Commentaires

1. Le lundi, 1 octobre 2012, 21:37 par FilGB

Tu veux dire des télés toutes plates qui permettent de regarder Koh Lanta ?

2. Le lundi, 1 octobre 2012, 23:40 par Stef

C'est plus une question d'information que de volonté. On mélange tout, on affole les gens pour pas grand chose.

Je reprend ton exemple du bisphénol A, que j'ai -forcément- suivi de près : du jour au lendemain on vire le bisphénol, on le remplace probablement par des composants qu'on connait moins bien comme si c'était une urgence sanitaire.
Les parents s'empressent de les jeter en maudissant ces fabricants qui ont mis en péril la santé de leur gosse. Mais ils continuent a rouler a 130km/h avec leurs enfants derrière et a fumer dans la même pièce qu'eux par contre... Ce n'est bien sûr pas le cas de tout le monde mais si le bisphénol était le plus grand risque sanitaire, je serais depuis longtemps au chomage !

Si au moins l'information sur la santé, l'écologie, l'économie, etc... était claire est impartiale, les gens adapteraient plus intelligemment leurs comportements.

3. Le mardi, 2 octobre 2012, 08:26 par Merome

@Stef : Ne dit-on pas que l'information est le "quatrième pouvoir" ? Or, ce pouvoir n'est pas encadré par la constitution (je ne sais d'ailleurs pas comment il pourrait l'être, mais c'est indéniablement un problème à se poser). Et donc, c'est bien à cela qu'il faut réfléchir, Stef, est-ce que tu ne crois pas qu'il faut s'attaquer à la racine du problème, la qualité de l'information, mais plus encore, l'encadrement strict du pouvoir qu'elle a par une constitution digne de ce nom ?

4. Le mardi, 2 octobre 2012, 11:35 par al.jes

@Merome : J'ai répondu à ton dernier commentaire sur mon blog : http://aljes.me/index.php?article=2...

5. Le mardi, 2 octobre 2012, 16:55 par Merome

@Al.jes :  On ne peut pas répondre chez toi ? Donc je le fais ici : je ne parle pas de réguler la presse, mais de l'encadrer. Il ne s'agit pas de faire de la presse un organe du gouvernement (sûrement pas !), mais de garantir son indépendance par tous les moyens. Interdire la publicité est une piste. Prévoir des plages horaires ou des espaces pour l'expression libre. Veiller scrupuleusement à la déontologie (par exemple en annonçant systématiquement les conflits d'intérêts éventuels des intervenants)... Bref, on est capable de garantir l'indépendance de la justice, on peut le faire pour les médias. J'espère.

6. Le lundi, 8 octobre 2012, 00:21 par Aimé Craft

@Merome Ca fait plaisir de lire ton opinion sur la presse et la diffusion de l'information en général. Je suis totalement d'accord avec ce que tu écris ici. Franchement, j'aurais pu l'écrire ! (c'est quand même très rare de s'y retrouver complétement). Je n'ai pas vraiment creusé, mais autant les articles, posts, etc. pour critiquer la presse sont nombreux (à juste titre), autant les articles traitant de solutions possibles sont rares voire inexistants. Ca me semble être une priorité pourtant.

Il y a une petite proposition ici : https://plus.google.com/u/0/1066764...

"en amont, notamment —quand c’est possible— en prévenant les gens que «l’information qu’ils vont recevoir peut être trompeuse»."

Aimé (va dormir content).

7. Le lundi, 15 octobre 2012, 16:42 par Tassin

20/20 pour cet article!

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