...malheur est bon.

Je sais que c'est un peu malvenu de se réjouir des choses graves, mais comme le dit le proverbe qui titre cet article, on peut toujours trouver du positif dans les pires circonstances.

La crise économique qui n'en finit plus de finir, et qui, je pense, va s'aggraver en France en 2010, a au moins le mérite d'avoir rendu compliqué l'exercice de style des candidats aux élections. La plupart de leurs analyses et de leurs solutions ne résiste en effet pas à la confrontation avec la réalité.

Il ne suffit plus de souhaiter ardemment et d'encourager la croissance économique pour faire un programme politique. L'impressionnante abstention du premier tour des régionales montre, entre autres, le désaveu total de cette politique du toujours plus.
Je pense qu'on n'a jamais tant parlé de décroissance que pendant ce scrutin. Pratiquement tous les partis ont eu à se positionner par rapport à ce thème, car il a été utilisé comme épouvantail par l'UMP pour déstabiliser l'alliance PS/Verts. Même si la décroissance a été critiquée, présentée de manière fallacieuse, et si tout le monde s'est désolidarisé du concept d'un air dédaigneux, il n'en reste pas moins qu'un nouveau clivage est apparu.

Si je prends mon département, le Doubs, où par chance une liste décroissante était présente au premier tour des régionales, le constat est sans appel.
L'année dernière pour les élections européennes, la liste Europe Décroissance avait obtenu 61 voix, soit 0.04% des suffrages exprimés sur le département.
Cette année, la liste Ecologie solidaire en Franche Comté a obtenu 1 682 voix dans le Doubs soit 0.96% des suffrages exprimés.
Si je compte bien, ça fait une progression de 2700 % en nombre de voix ! Ce n'est pas rien et on ne devrait parler que de ça dans les journaux :)

La décroissance sort de la clandestinité tout doucement. Le président lui-même en dit du mal, ce qui est en soi un signe encourageant. Mais toutes les structures locales et les associations qui appliquaient la décroissance sans le dire peuvent enfin le clamer haut et fort sans rougir.
Je viens de recevoir la publication des jardins de Cocagne (L'arrosoir), distribué par l'AMAP qui me fournit en légume. L'article en première page pourrait être publié sur ce blog ! Je vous en cite un extrait :

Pour ces consommateurs citoyens, l'acte d'achat est aussi un acte politique. Face à la montée en puissance des multinationales, à la délocalisation de la production, à la mondialisation des échanges, ils ont le sentiment que le pouvoir de changer la donne est moins dans le droit de vote que dans le porte-monnaie.

Les critiques virulentes de Lutte Ouvrière un peu partout sont également un excellent signe de l'émergence d'une alternative nouvelle, qui fait de l'ombre aux anciens schémas révolutionnaires. Des utopies qui se heurtent elles-aussi à la réalité climatique et aux limites de ressources.

La décroissance est la première idéologie, je crois, à prendre en compte la globalité des problèmes de société, en incluant bien sûr l'environnement dans le cœur des préoccupations. Tout se passe comme si les éminents chercheurs en politique avaient omis un paramètre pourtant capital dans l'élaboration de leurs projets de société : la Terre. Rien que ça.

Là où tout devient limpide, c'est quand on se rend compte que non seulement la décroissance apporte des solutions là où la croissance engendre des problèmes (l'écologie), mais en plus elle replace l'Homme au centre du débat, à la place de la production ou du travail, comme le font les idéologies productivistes. C'est tellement simple et évident qu'on se demande pourquoi personne n'y avait pensé avant.

Commentaires

1. Le lundi, 22 mars 2010, 10:25 par Marzi

"L'impressionnante abstention du premier tour des régionales montre, entre autres, le désaveu total de cette politique du toujours plus."

=> ah ca, chacun voit dans les abstentionnistes ce qui l'arrange.

2. Le lundi, 29 mars 2010, 00:37 par gruick

Je suis d'accord avec l'ensemble de ton billet. J'ai moi aussi suivi l'évolution de la liste décroissante en Franche-Comté et même si le score global fait encore pâle figure en regard de celui des partis "traditionnels", cette forte progression est à souligner. Si l'on s'intéresse maintenant à l'avenir, je pense que celui de la décroissance est essentiellement dans les régions rurales comme la nôtre. Comme tu l'as souligné, l'essentiel est dans le lien des hommes à la terre, lien qui reste fort dans nos régions et que l'on doit chercher à renforcer et à élargir aux populations qui ne se sentent pas (encore) concernées. Le fait de priviliégier la consommation locale de fruits et légumes peut en constituer la première étape. Bon courage en tout cas.

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