Un petit bilan de mes pollutions estivales (à ne pas confondre avec les pollutions nocturnes)

Je roule en voiture électrique partiellement depuis 2012, et complètement depuis 2015. Pour pouvoir caser mon épouse, 3 enfants (de plus de 14 ans, donc de taille adulte), un chien (de plus de 40 kg !) et les bagages associés, j'ai fait l'acquisition récemment d'une Kia e-Niro 64 kWh. Ça m'a coûté un bras, même avec la prime écolo de 6000 euros, et je n'ignore évidemment pas que toute construction de voiture neuve est polluante et nocive, surtout une électrique avec une grosse batterie comme celle-ci.

Néanmoins, tout bien considéré et à la lecture des différentes études sur le sujet qui sont unanimes (contrairement aux journaux qui, pourtant, les citent), l'éco bilan global d'une voiture électrique reste meilleur que celui d'une voiture thermique (source 1, source 2, source 3, source 4, source 5) . L'idéal étant bien sûr de se passer de voiture, mais c'est un sacrifice qui m'est aujourd'hui extrêmement difficile. Ou plutôt devrais-je dire impossible pour mon foyer. Si j'étais seul et/ou en ville, les choses seraient sans doute différentes.

Donc ne vous méprenez pas sur mes propos : la voiture électrique ne va pas sauver le monde, elle n'est pas "verte" ni "propre". Elle est seulement un petit peu mieux, écologiquement, qu'une voiture thermique équivalente, de la production au recyclage, en passant par l'utilisation. Le vélo électrique, le vélo tout court, la marche à pied restent les modes de déplacement à privilégier chaque fois que c'est possible.

Ce préambule étant fait, j'ai choisi une destination de vacances à 500km de chez moi (en Ardèche) ce qui est à la limite de portée de cette voiture (l'autonomie de la batterie est de 450 à 500km, selon le relief, la vitesse de déplacement...). Pour ne pas prendre de risque, j'avais prévu pour l'aller un seul arrêt-recharge (en plus d'autres arrêts de sécurité/confort/changement de conducteur) à Saint Vulbas, sur une borne CNR délivrant 50 kW.

Les bornes de recharge, c'est le point critique de l'électro-mobilité en France à ce jour. Heureusement, on n'en a pas souvent besoin, voire bientôt plus besoin du tout, si l'on adapte nos usages (aller moins loin, moins vite...) et que les progrès technologiques poursuivent le gain d'efficacité des batteries. Le point de recharge de Saint Vulbas est située dans une zone industrielle parfaitement déserte le samedi. En plein soleil, l'écran est totalement illisible mais on comprend vite que l'une des bornes refuse de lancer la recharge. La borne voisine semble plus conciliante et la voiture semble commencer à prendre des watts, il est temps de partir en quête de quelque chose à manger pendant la petite demi-heure nécessaire pour sécuriser mon trajet (et non pas pour faire le plein). Au mois d'août et un samedi, pas moyen de trouver un seul truc ouvert à portée de cette borne. Rien. Nada. Donc après avoir grignoté sous des arbres les viennoiseries qu'on avait pris "au cas où", on retourne à la voiture pour voir que... la charge s'est arrêtée presque immédiatement après son démarrage. Autrement dit, on n'a pas gagné un kilomètre d'autonomie et perdu une heure.
C'est vraisemblablement la chaleur qui a causé le dysfonctionnement car la plupart des bornes délivrant au moins 50kW ont été touchées par ce "bug". Malgré des ventilos tournant à plein régime, les canicules successives ont eu raison de l'électronique. Par ailleurs le modèle économique chancelant de l'activité consistant à exploiter des bornes de recharge ne permet pas pour l'instant à des acteurs industriels de proposer un service de qualité.

Heureusement, j'avais encore de la marge avec presque la moitié de ma batterie, donc de quoi faire plus de 200km avant d'être à sec. J'ai pris la direction de la N7 et suis passé devant une borne du réseau SEDI (e-born) à Péage-de-Roussillon. C'est une borne délivrant seulement 22kW au maximum (et seulement 7kW dans mon cas car le chargeur en courant alternatif embarqué de la Niro est limité à 7kW), mais comme on n'avait toujours pas mangé et qu'il était bientôt 16h, une longue pause déjeuner de 1h22 nous a fait du bien et nous a permis de récupérer 9kWh pour 4.10€, assez pour arriver à bon port sans souci.

Bilan consommation de ce trajet : 12.4 kWh / 100 km.

Il n'est pas inutile de s'arrêter sur ce chiffre et de le comparer à ce qu'on peut faire en voiture thermique. 1 litre d'essence c'est 9.63 kWh d'énergie. Une voiture économe qui consomme 5 litres au cent sur ce type de trajet aurait donc consommé 48.15 kWh / 100 km. Quatre fois plus d'énergie pour faire le même trajet. Pour obtenir une consommation équivalente, il faudrait une voiture qui consomme 1.25 litre d'essence au 100 km.

J'ai consommé environ 60 kWh pour faire ce trajet. 1kWh me coute en moyenne 15 centimes aujourd'hui (chez Mint Energie), le trajet m'a donc coûté 9 euros environ, à comparer aux 25 litres d'essence qu'il m'aurait fallu pour faire le même trajet en voiture thermique (toujours à 5 litres / 100km) et qui m'aurait coûté 35 euros environs. Presque quatre fois plus cher.

En terme de CO2, le mix énergétique français tourne autour de 90g de CO2/kWh (Mint Energie prétend que son propre mix est à 10g de CO2/kWh et sans nucléaire, mais je prends l'hypothèse haute), mon trajet a donc émis 60*90= 4500g de CO2 = 4.5 Kg de CO2. Une voiture thermique récente et sobre émet de l'ordre de 90g de CO2 par kilomètre. Elle aurait donc émis sur ce trajet 500*90=45.000g de CO2 = 45Kg de CO2. Soit 10 fois plus de CO2 !

Au niveau des particules, c'est un peu plus difficile de compter et on manque de chiffres sérieux. Une bonne partie des particules provient de l'abrasion des pneus et de l'usure des plaquettes de frein. Si une voiture électrique n'utilise presque jamais les plaquettes (car c'est la régénération de la batterie qui va opérer la plupart des freinages), elle est un peu plus lourde à cause de sa batterie et use donc un peu plus les pneus. Si l'on considère (hypothèse de ma part fondée sur aucune donnée sérieuse) que les 2 effets s'annulent (c'est à dire que les particules supplémentaires émises par la voiture électrique sont compensées par les particules non émises au freinage) il ne reste plus que les particules liées à la combustion du moteur thermique qui sont de l'ordre de 60mg par kilomètre selon la norme Euro 6.

Juste à côté de mon lieu de villégiature (où je pouvais de toute façon recharger ma voiture sur une prise domestique classique, sans installation spéciale et sans payer), se trouvait une borne 50 kW gérée par le SDE07 (e-born). J'ai pu récupéré le lendemain de mon trajet 31 kWh en 40 minutes pour 14.78€.

Au retour, j'ai changé de stratégie : puisque les bornes rapides sont capricieuses par ces chaleurs et que finalement, à l'aller, je n'en ai pas eu besoin, j'ai choisi un borne délivrant du 22kW sur un parking d'Intermarché. Double avantage : la recharge est gratuite, et je peux aller acheter à manger au supermarché. J'ai obtenu la même consommation moyenne de 12.4 kWh / 100 km.

Outre les gains économiques et écologiques directs sur ce trajet, il ne faut pas négliger les effets de bords de la voiture électrique :

- Le confort de conduite incomparable : "boite" automatique, frein moteur important (et réglable) permettant de conduire à une seule pédale, silence à bord et pas de vibration (même si la e-Niro s'avère un peu plus bruyante que mon ex Zoé, mais elle est plus grande).

- La prise de conscience inévitable de ce que "coûte" l'énergie, et à quel point elle est précieuse. Elle nous invite à rouler plus lentement, à ne pas prendre l'autoroute, à pratiquer l'éco-coduite, à planifier son trajet en utilisant les outils en ligne : https://abetterrouteplanner.com/ et https://fr.chargemap.com

- Les coûts réduits d'entretien qui s'ajoutent aux gains économiques de la voiture électrique : pas de vidange, pas d'échappement, de courroie de distribution, de boite de vitesse, moins de plaquettes... Ma e-Niro est par ailleurs garantie 7 ans. Pas trop de surprise à craindre au niveau de la longévité de la batterie (Nissan s'inquiète même du fait que ses batteries durent plus longtemps que le véhicule lui-même). Ma C-Zéro de 2012 ne montre pour l'instant aucun signe de fatigue, mise à part la diminution (attendue) de l'autonomie de 15 à 20%, je ne l'amène jamais au garage sauf pour changer les pneus.

Moralité, si vous êtes sur le point de changer de voiture, ou d'acheter votre première voiture ou celle de votre enfant, après avoir vérifié qu'il n'y a pas d'autre alternative (déménager, prendre les transports en commun, le vélo...), prenez de préférence une voiture électrique et de préférence une voiture électrique d'occasion. Seules contre-indications : vous faites régulièrement plus de 100km par jour, plusieurs jours de suite / vous n'avez pas de prise domestique ou de borne de recharge à disposition près de chez vous.

Si vous vous apprêtez à passer à la voiture électrique, n'ayez pas peur de changer vos habitudes et vos réflexes. Au lieu d'aller à la pompe une fois par semaine ou 1 fois par mois, vous brancherez votre voiture tous les soirs ou une fois par semaine chez vous. Cela vous prendra moins de temps (contrairement à la pompe à essence, pas besoin d'être devant la voiture quand elle se charge), et ça vous salira moins les mains. Plus besoin non plus de faire un détour pour passer à la station. Beaucoup de bornes de recharges gratuites sont proposées par les grandes surfaces et les réseaux départementaux. Vous pourrez donc joindre l'utile à l'économique.

Mes conseils d'achat :

Si vous êtes un très gros rouleur, avec un budget conséquent : une Tesla model 3 ou model S d'occasion. Les Tesla sont les plus efficientes sur autoroute et bénéficient d'un réseau de superchargeurs qui vous éviteront à coup sûr les déboires que j'ai décrits ci-dessus, en plus d'autres atouts que seule cette marque vous proposera (notamment pour les geeks). L'option AutoPilot me paraît totalement inutile. Prenez la moins chère que vous trouvez (en état !). (à partir de 45.000 euros)

Pour une familiale avec une bonne autonomie, il n'y a pas beaucoup de choix : Hyundaï Kona ou Kia e-Niro. C'est encore un peu tôt pour les trouver en occasion à un prix raisonnable. (à partir de 36.500 euros pour une e-niro neuve, il peut y avoir un peu d'attente)

Pour une citadine capable de faire un grand trajet de temps en temps et déplacer une famille de 4 de temps en temps : Zoé ZE40 d'occasion, en vérifiant qu'il n'y a pas de location de batterie associée. (à partir de 12.000 euros d'occasion)

Pour les moins chères et faire uniquement de la ville (moins de 100 km par jour en été, moins de 60 km par jour en hiver) : Peugeot Ion ou Citroën C Zéro d'occasion. (à partir de 8.000 euros d'occasion)

Pensez que le surcoût à l'achat sera compensé au moins en partie par le moindre coût au kilomètre (entretien + "carburant").

Attention : la plupart des voitures électriques ne sont pas homologuées pour tracter. Même pour un porte-vélo sur boule d'attelage, c'est compliqué. Si vous avez des besoins particuliers dans ce domaine, faites gaffe.

Si vous avez des questions ou besoin de conseils : commentez !

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