Ma critique du film de Gérard Mordillat

Hier soir, je suis allé voir un film avec François Morel, Jacques Weber, Edouard Baer... Pourtant, vous n'en avez peut-être pas entendu parlé, et il ne passe sans doute pas dans votre multiplexe habituel : Le grand retournement
Et pour cause : c'est le film qui est issu de la pièce en alexandrins D'un retournement l'autre de Frédéric Lordon, économiste dit "hétérodoxe" parce qu'il était favorable au rachat des banques à l'euro symbolique en vue de les nationaliser. Aucune chance d'avoir un financement, puis une distribution correcte d'un film qui crache ainsi dans la soupe.



Un film tout à fait original, donc, aussi bien dans la forme que dans le fond, qui était diffusé dans un petit cinéma pas loin de chez moi, à l'initiative des "Amis du monde diplomatique".

Sur le fond, bien sûr, rien à redire, je suis en total accord avec le propos, voire même je trouve qu'il ne va pas assez loin dans la dénonciation du système monétaire et du déni de démocratie que nous connaissons. C'est une excellente façon cependant de se remémorer cette période post-crise de 2008 où les banquiers nous l'ont mis bien profond, ou d'en prendre conscience si vous n'êtes pas encore totalement convaincu.

Sur la forme, il faut admettre que c'est audacieux et donc forcément très étrange. Il faut déjà distinguer plusieurs choses :

Les décors sont à chier. Tourné avec un budget minimal dans une usine désaffectée, le film a fait l'impasse sur le réalisme des décors. Le bureau du président à l’Élysée est donc placé au beau milieu de l'usine, ainsi que toute l'action, que ce soit chez les banquiers, à Matignon... Je crois que j'aurais préféré un tournage en studio, car le réalisateur s'oblige en plus à faire des mises en scène un peu ridiculement théâtrales dans les endroits les plus glauques de l'usine.

Les acteurs sont juste géniaux. Je n'avais pas de doute sur François Morel qui est capable de jouer le crétin décérébré dans les Deschiens ou le bouseux énervé dans Kaamelott, tout en étant poète ou commentateur politique acerbe sur France Inter. En revanche, les comédiens "classiques" comme Jacques Weber ne m'ont jamais trop impressionné. Je m'attendais à ce qu'ils déclament les vers à la Molière, en en faisant des caisses et en prenant des postures. Il n'en est rien, et malgré le côté rigide des alexandrins, ils sont tous ou presque, absolument excellents. Mention spéciale pour Franck de la Personne, si si, je suis sûr que vous l'avez déjà vu :



La forme du texte, toute faite de vers de 12 pieds, est un régal. Ce qu'on y perd en modernisme, on le gagne en décalage et dans la forme "percutante" du discours. On attend les rimes, on est ébloui de voir comme ça tombe juste, si Lordon a ce phrasé si particulier qu'on lui connaît déjà de ses conférences, il faut reconnaître qu'il se sort admirablement bien de cet exercice particulier.

Au contraire des Nouveaux chien de garde, que j'avais vu au même endroit, le film n'est clairement pas accessible au grand public. N'y emmenez pas votre petit neveu ou votre beau-frère UMP, il va trouver ça chiant comme la mort et ne va sans doute pas en sortir plus intelligent. Pour les autres, c'est un régal culturel et original. Quelque chose à voir.

Le film était suivi d'un débat, mais sans la présence de l'auteur du film, il n'avait aucun intérêt.

Commentaires

1. Le samedi, 23 février 2013, 09:05 par Baltec

En effet merome, ils ne sont pas encore au point les bot niveau intelligence artificielle :-D

2. Le dimanche, 24 février 2013, 22:44 par Etheriel

Fais gaffe, tu commences à devenir un poil élitiste. Tu devrais regarder "Le gout des autres", ce film aussi rend plus intelligent :)

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1. Le samedi, 23 février 2013, 18:42 par Pearltrees

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