Mettons à jour notre vision de la construction européenne.

Aujourd'hui, je nous invite à réfléchir ensemble aux affaires européennes, rien que ça.
Si vous êtes à peu près trentenaire, comme moi, vous avez appris à l'école tous les bienfaits de la construction européenne, depuis la CECA en 1952, en passant par la CEE puis l'Union Européenne. L'eurovision, le drapeau avec les douze étoiles d'or, la réconciliation entre la France et l'Allemagne, l'image symbolique de Mitterrand et Kohl se tenant la main...



Tout cela est bien gravé dans notre inconscient collectif, et pour quelqu'un d'à peu près équilibré politiquement, l'Europe ne peut être qu'une avancée majeure vers la paix entre les peuples, la libre-circulation des marchandises et des personnes ne peut-être que bénéfique pour la concurrence libre et non faussée, et la monnaie unique un pas de plus vers la communion totale, limite partouze continentale avec nos voisins qu'on adore.

En 1992, j'avais 17 ans, pas encore le droit de vote, mais des mois de vacances scolaires à perdre, alors j'ai lu le traité de Maastricht. Comme ça, pour me faire une idée, puisqu'on ne parlait que de ça à la télé. Il serait prétentieux de dire que je l'ai compris. A vrai dire, avec le recul, j'ai pas pigé un broc de ce qui était écrit là-dedans, mais l'impression que j'en ai retiré c'était que les nations, en s'unissant devenaient plus fortes, et plus intimement liées, nous garantissant des années sans guerre et la prospérité économique.
Sur le papier, c'était séduisant. J'ai conseillé à mes parents de voter "Oui" au référendum, ce qu'ils ont fait (mais pas rien qu'à cause de moi, hein !) comme la majorité des français.

En 2005, lors du référendum sur le Traité Constitutionnel Européen (TCE), j'étais déjà beaucoup plus dubitatif. L'Europe de paix et de prospérité qu'on nous avait vendu était en fait une Europe de libéralisme et d'inégalités. J'ai voté non, et une majorité de français avec moi, ce qui n'a pas empêché le gouvernement de s'asseoir sur notre choix, renforçant un sentiment de déni de démocratie qui préexistait.

Sept ans plus tard, mon scepticisme est à son paroxysme, mais je sens malgré tout une réticence interne à moi-même (en dedans, quoi), à jeter aux orties cette belle idée d'une Europe des peuples unis pour le meilleur et pour le pire.
D'où une légère tentation souverainiste frustrée par mon inconscient Européiste. L'inconvénient, c'est que "souverainiste" peut s'entendre de deux manières différentes :
Il y a le souverainisme nationaliste : "les bougnoules dehors", "la France aux français", "c'est pas les Allemands qui vont décider à notre place"... dans lequel je me reconnais assez peu.
Et il y a le souverainisme dans le sens : "peuple souverain", c'est à dire maître de ses choix, décidant politiquement des évolutions futures de la société.

L'amalgame entre les deux est savamment entretenu par je ne sais qui, et empêche quiconque de se positionner de façon claire. Quand on vous fournit une grille de lecture bipartisane, le souverainisme se situe plutôt très à droite.
C'est commode pour balayer d'un revers de la main tout ce qui pourrait conduire à une réflexion posée sur ce qu'est vraiment l'Union Européenne aujourd'hui. Est-ce une Europe des peuples ou des multinationales ? Peut-on seulement remettre en cause cette construction Européenne pour en proposer une autre basée sur les besoins des gens et la bonne gestion des ressources naturelles ?
Il semblerait que non. Et ça m'attriste.

J'en suis à un point limite complotiste où je me demande si l'Europe n'a pas été une façon sournoise et efficace de nous retirer le peu de pouvoir que l'on avait pu obtenir depuis la Révolution. L'élection, déjà, était une grossière parodie de démocratie où les médias et les financeurs de campagne jouent un rôle beaucoup trop important pour être honnêtes. Mais en éloignant encore le centre de décision du peuple, en le mettant à Bruxelles ou Strasbourg, on nous confisque carrément la possibilité de choisir notre destin, en le mettant entre les mains des banquiers et des industriels.

Et vous, vous la voyez comment l'Europe ?

Commentaires

1. Le jeudi, 9 février 2012, 23:38 par JeffRenault

D'un côté je partage ton analyse, et d'un autre, quand je vous l'activisme de certain(e)s député(e)s européen(ne)s (ex : Sandrine Bélier, Pascal Canfin, Corinne Lepage, Dany Cohn-Bendit...), je ne peux m'empêcher de trouver qu'il font un boulot avec beaucoup plus de pugnacité que nos "représentant(e)s" du parlement national

Mais le fond du projet est en effet dévoyé par la puissance financière qui essaie d'en faire un territoire de jeu, là où nous le Peuple européen voudrions un espace de paix et de libertés.

Ne désarmons-pas. Un idéal peut perdurer au-delà des coups de butoirs qu'il subit, et même s'en renforcer. Optimisme ? Naïveté ? Utopie ? Peut-être. Comme toi j'ai un fond européiste qui survit et continue d'espérer.

Beau billet. Merci.

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