La carte et le territoire

Oublions un instant l'actualité brûlante et brutale pour causer un peu culture.
Je lis assez peu et suis particulièrement ignare en la matière, aussi, quand je termine un bouquin je me plais à m'en vanter sur le blog pour faire celui qui s'y connait suffisamment pour critiquer un vrai auteur.

Étant moi-même auteur amateur et sans talent, je ne peux pas m'empêcher de comparer l'infâme bouse que je suis capable de produire avec les écrits des vrais auteurs édités et pire encore aujourd'hui : ceux qui ont obtenu un prix.

De Houellebecq, j'ai lu avant cet ouvrage Les particules élémentaires, Extension du domaine de la lutte et Plateforme.
C'est un des auteurs que j'ai le plus lu et on pourrait croire que c'est parce que je l'apprécie. En fait, c'est plus compliqué que ça. Je devais avoir 25 ans quand j'ai lu les particules élémentaires et j'ai apprécié l'ambiance moderne, scientifique et crue qui était décrite. Je découvrais cette forme de littérature un peu moins gnan-gnan que ce qu'on nous faisait lire à l'école, et cela a sans doute influencé mon appréciation de l'époque.

Depuis, j'ai lu un paquet de truc, mais surtout sur le web, dans des articles, des blogs, des nouvelles, et ce côté impertinent et désabusé, j'en ai un peu soupé.
Car les personnages de Houellebecq sont presque toujours désabusés et solitaires. Presque toujours aussi, ils abordent la sexualité d'une façon complètement mortifère, dépourvue de tout sentiment, mécanique. Les personnages de Houellebecq n'ont jamais aucune ambition. En tout cas n'en montrent-ils pas, car ils leur arrivent de réaliser de grandes choses, comme c'est le cas dans ce volume.

Je ne connais pas assez le milieu littéraire pour savoir comment est attribué le prix Goncourt et s'il correspond à un quelconque gage de qualité reconnu et attesté. Je n'ai pas dû lire beaucoup d'autres prix Goncourt dans ma vie et je n'ai donc pas beaucoup d'éléments de comparaison.
Ce roman ne m'a pas semblé mériter une telle distinction, ou au moins la représentation que je me fais d'icelle. L'histoire se lit sans peine, et n'est pas inintéressante. Les personnages, s'ils ne sont pas du tout attachants, n'en sont pas moins intéressants à observer. On se surprend à espérer qu'un déclic leur donne un peu de goût à la vie, mais ce déclic ne vient jamais. La dernière partie, qui tourne à l'enquête policière me semble totalement déconnectée des deux premières, sans aucun rapport.
Par conséquent, il n'y a pas d'intrigue, ni de mystère, ni de suspens. Je n'ai pas réussi à y lire ni morale ni vision sur la société. Tout au plus, on trouve ça et là le commentaire de Houellebecq sur un petit bout de la société de consommation, du monde du travail et surtout de l'art. Mais ces réflexions, pourtant de bonne qualité, manquent de profondeur, de suivi pour qu'elles suffisent à la qualité de l'ouvrage.

Bien sûr, le vocabulaire et la construction du bouquin sont riches. D'une richesse que je ne pourrai jamais prétendre atteindre un jour. Et rien qu'en cela, Houellebecq mérite bien d'être publié et même d'être en tête de gondole. Par ailleurs, il n'est pas impossible que je sois passé complètement à côté d'une double-lecture du bouquin qui lui donne un sens vertigineux, ça m'est déjà arrivé. Mais comme souvent quand je termine un livre, je me dis "c'est tout ?", et cela me motive à progresser dans mon propre travail d'écriture.

Si vous aimez Houellebecq, vous ne serez pas déçu en lisant ce livre. Si vous n'aimez pas, lisez donc les miens (en plus, il sont gratuits !)