Mon point de vue inutile et toujours en retard.

L'affaire du moment, après la déroute de l'équipe de France, c'est une histoire de gros sous et de politique. On sait depuis longtemps que les deux sont souvent liés, mais en période de crise, de rigueur, de serrage de ceinture, soudain, les millions d'euros prennent des sonorités nouvelles, insupportables, inexcusables.

Si l'on devait trouver un point positif à cette crise économique, ce serait ce début de prise de conscience des citoyens et des journalistes au sujet des comportements de ceux qui nous gouvernent et de ceux qui nous vendent des trucs.

Malheureusement, je crains que cette affaire, comme les autres, retombe comme un soufflé aussitôt l'orage médiatique passé. Car en vérité, il y a très peu de comportements condamnables dans les faits rapportés. Du pognon qui circule, plein, des conflits d'intérêts, sans doute, du copinage, à n'en point douter, mais rien qui ne fasse l'objet de poursuites judiciaires importantes. On va tapoter sur la joue de Woerth, au pire, le faire démissionner comme Joyandet et son comparse aux cigares dont j'ai déjà oublié le nom, et puis voilà.

Ce que démontre les faits rapportés ces derniers jours, c'est l'immoralité de la conduite des gens qui ont du pouvoir ou du pognon. Et le décalage avec la vraie vie, celle que l'on connaît. On parle de retraits quasi quotidiens de sommes qui nous servent à nous à acheter des maisons ou des voitures, une ou deux fois dans notre vie, en passant le reste du temps à rembourser. Ce décalage prend une signification difficilement supportable quand on sait la difficulté de certains à, simplement, garder leur emploi, ou survivre à la crise.
Superno résumait ça très bien de la façon suivante : Prenez 99% de la fortune Bettencourt, il reste encore 160 millions d'euros. Hors, cette fortune est à peine imposée, et aucun contrôle fiscal n'est venu mettre son nez dedans.

Mais voilà, c'est tout à fait légal d'avoir du pognon, même si ce sont des sommes abracadabrantes qui n'ont pu être obtenues qu'en écrasant les autres, qu'en spoliant les plus pauvres. On a le droit de faire ça. Comme on a le droit de faire cadeau de son argent à ses amis, qu'ils soient politiciens, coiffeurs ou majordomes. Cela ne pose qu'un problème de moral, et la justice ne se mêle pas, ou que très peu, de la morale.
Cela ne devient insupportable à entendre qu'en raison des montants annoncés. Mais si ça peut vous rassurer, le petit maire du village de 300 habitants, à son niveau et toute proportion gardée, reçoit les mêmes avantages. Pire : chacun de nous baigne dans le conflit d'intérêt et la recherche du profit personnel. On profite des stylos et de la place de parking gratuite de son boulot, on imprime des recettes de cuisine ou des faire parts en couleur avec l'imprimante de l'entreprise... Même la défense de l'environnement sert égoïstement à préparer à NOS enfants, d'abord, un monde meilleur.

Où veux-je en venir ? À cette conclusion : puisque l'homme profitera toujours de son pouvoir, de sa position dominante, de son argent, pour son intérêt personnel avant tout, et puisque ce n'est pas possible de légiférer sur ce point, il faut faire en sorte que cela ne soit pas possible de gaspiller des sommes aussi considérables (comprendre : réduire les inégalités), et faire en sorte que les élections ne dépendent pas des sommes dépensées en communication (comprendre : interdire la publicité, le cumul des mandats, et imposer le tirage au sort des élus ou tout autre mode de scrutin qui ne souffre pas des défauts de celui qu'on connait).

Ce que les journaux nous montrent aujourd'hui, c'est une goutte d'eau dans l'océan des intérêts personnels de tous les gens qui ont un peu de pouvoir ou de pognon. Les médias en profitent pour se refaire une santé, Médiapart, L'express ou Marianne rivalisent de scoop pour reprendre du poil de la bête et des parts de marchés. Mais leurs journalistes agissent, eux aussi, dans leur propre intérêt et flirtent avec l'immoralité chaque jour (par exemple en utilisant des propos enregistrés à l'insu de leurs interlocuteurs).

Il y a tout un système à foutre en l'air, et je crains que cette affaire Woerth/Bettencourt ne nous permette pas d'en prendre le chemin.

Commentaires

1. Le samedi, 10 juillet 2010, 22:18 par Raf

"son comparse aux cigares dont j'ai déjà oublié le nom"

=Christian BLANC. Je le reconnais il porte bien mal son nom, c'est pour ça que tu dois avoir du mal à le retenir!

2. Le dimanche, 11 juillet 2010, 09:31 par Merome

@Raf : merci. Ou alors, c'est que ça m'indiffère profondément.

3. Le dimanche, 11 juillet 2010, 16:03 par pierre

Salut,

"Les médias en profitent pour se refaire une santé, Médiapart, L'express ou Marianne rivalisent de scoop pour reprendre du poil de la bête et des parts de marchés"

De les comparer aux journaux paparizzéens est dommage.
Aujourd'hui le seul contre-pouvoir ce sont ces médias là.
Il en va de notre démocratie, et la garantie de la liberté de la presse nous garantira notre liberté d'expression.

Maintenant si l'immoralité est de dévoiler les pratiques dénoncées par ces médias plutôt que les pratiques elles mêmes, on n'est pas sauvé...

PS:tu cites Médiapart, L'express ou Marianne mais tu oublies le Point (eh oui) Libération, Le Parisien, L'est Républicain, Le Pays...

4. Le dimanche, 11 juillet 2010, 19:55 par Merome

Pierre : Je critique juste la surenchère de ces journaux, et le racolage des lecteurs avec des titres sensationnels. Mais je t'accorde que les médias traditionnels sont loin d'être exemplaires dans ce domaine. Le Figaro titrait aujourd'hui "Le rapport qui blanchit Woerth", en parlant d'une enquête demandée par le ministère lui-même. C'est comme si on demandait à Xavier Bertrand d'évaluer la politique de Sarkozy. Objectif et tout.

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