1er mai : fête du travail !

Cette année, j'ai décidé de la célébrer dignement.

Depuis le temps que je n'ai pas le temps, il fallait bien qu'un jour ou l'autre, j'agisse. De plus en plus frustré par un planning trop chargé, qui m'empêchait de mener à bien certains projets personnels, de m'occuper de ma famille, d'entretenir ma maison, de prendre le temps de réfléchir et d'agir selon les idéaux qui sont les miens, j'ai décidé de passer à 80%.

Profitant honteusement d'une position privilégiée qui me permet de le faire sans risque aucun, j'ai bien conscience d'être un peu atypique et chanceux, parmi les gens de ma génération, mais je me suis dit que ce n'était pas une raison suffisante pour ne pas le faire.
Ainsi donc, à partir du premier mai, date hautement symbolique, je ne travaillerai plus le jeudi, et plus que 7h12 les quatre autres jours. Elle est pas belle la vie ?

Bien sûr, c'est au prix de quelques sacrifices qui, au bout du compte, n'en sont pas pour moi. Je sacrifie 20% de mon salaire, soit 4 ou 500 euros de moins par mois, de l'argent dont j'ai la chance de pouvoir me passer car j'ai un projet de vie extrêmement simple et où les efforts financiers sont dégressifs avec l'âge. Une gestion en bon père de famille certes largement facilitée par une certaine aisance financière que je ne dois toutefois qu'à mes choix personnels et à mes parents qui m'ont permis de faire les études qui vont bien.
Je sacrifie sans doute une partie de ma "carrière". Entre guillemets car je n'ai jamais envisagé ma vie professionnelle sous ce terme. Mon principal objectif professionnel est de travailler dans un domaine qui me plait et qui évolue. Être calife à la place du calife ne m'intéresse pas, pas plus que d'essayer de gravir l'échelle sociale par la face nord, tant j'ai le sentiment, déjà, d'usurper ma place. En début de carrière, je gagnais déjà près de deux fois plus que mes deux parents réunis (en fait, ma mère ne travaillait pas !). Je ne suis pas sûr d'avoir mérité ça.

Quant à ce que je gagne, c'est inestimable. Trente minutes de sommeil supplémentaire le matin, un aller-retour en vélo (ou en voiture polluante l'hiver) par semaine, soit une heure (une demi-heure en voiture) de gain net. Une journée de garde en moins pour mes trois numéros, du temps supplémentaire avec eux, et du temps à la maison pour gérer le quotidien avec moins de pression.
Une pression que je m'auto-administre en grande partie, à cause de trop fortes exigences éducatives, familiales, domestiques et des loisirs trop nombreux et chronophages. Je fourmille d'idées, pas toutes (pas souvent ?) bonnes qu'il me dégoute de laisser pourrir faute du temps matériel pour les mettre en œuvre.
Je gagne par ailleurs une certaine cohérence. On ne peut pas, à longueur de journées, prôner "moins de biens et plus de liens", un des slogans de la décroissance, sans montrer l'exemple un jour et appliquer le précepte.

Je libère aussi du temps pour une certaine forme d'engagement, individuelle, désintéressée, et peut-être même iconoclaste si je savais, diable, ce que veut dire ce mot.

Peut-être que dans un an, j'écrirai un billet pour expliquer pourquoi j'abandonne ce temps partiel et comment je reviens à 100%, mais au moins j'aurai essayé et je n'aurai pas de regrets.

Commentaires

1. Le samedi, 1 mai 2010, 21:52 par agase

Je trouve ton initiative très bonne et j'y adhère totalement. J'y pense également mais pas tout de suite, dans deux ou trois ans, histoire de pouvoir assoir un peu ma position professionnelle actuelle.

Toutefois, je me pose quand même quelques questions :
tu dis "moins de biens, plus de liens". Mais si je ne me trompe pas, tu ne travailleras pas le jeudi. Et le jeudi, les enfants sont à l'école, ta secrétaire (qui est elle même à mi-temps) travaille aussi. Alors comment vas-tu renforcer des liens avec ta famille si elle n'est pas là en même temps que toi ? J'ai peut être une réponse, tu vas passer ton jeudi à faire le ménage, les courses,... afin de pouvoir consacrer tout ton temps ensuite à ta famille ?
Egalement, tu gagnes 30 minutes le matin, pour dormir 30 minutes de plus. Tu tisses des liens en dormant ? :)
Peut être que tu as besoin de ces 30 minutes pour être de meilleure humeur ?

Enfin, si tu peux/veux nous éclairer ? Est-ce du temps totalement pour ta famille ou gardes-tu également un peu de temps pour toutes tes activités ? D'ailleurs, s'il t'en reste un peu, j'ai des idées. :)

Enfin, en tant que fonctionnaire, un autre avantage, c'est de ne pas perdre 20 % de salaire :)

Pour conclure, dans un an, c'est 50% que tu demanderas et non pas 100 %.

2. Le dimanche, 2 mai 2010, 10:42 par Bob

Je revendique la paternité de l'idée : c'est moi qui ai dit le premier que j'allais me mettre à 80 % :p Bon dans mon cas c'est un peu différent puisqu'il s'agit d'un congé parental : l'employeur ne peut pas le refuser, pas de négociation ou presque - en théorie c'est l'employeur qui fixe la répartition du temps.

Une chose qui me semble intéressante à noter, c'est que (paradoxalement ?) réduire mon temps de travail me pousse à mieux m'organiser au bureau pour exploiter mon temps plus efficacement. Du coup non seulement j'ai une journée de stress-de-bureau en moins mais en plus j'ai tendance à revenir plus satisfait qu'avant des quatre autres. C'est déjà un gros bénéfice à la base.

Ensuite à la maison, c'est rien que du bon : toute une journée pendant laquelle je peux m'occuper de mon bébé, décharger ma femme d'une partie de l'entretien de la maison, lui libérer du temps pour qu'elle puisse sortir seule, ou du temps ensemble, pouvoir aller voir de la famille le week-end en ayant toujours un temps de repos pour soi.

Il y a des hommes pressés pour qui le temps c'est de l'argent. Personnellement je préfère renverser la vapeur : l'argent, c'est du temps. Une fois qu'on gagne assez du premier, on peut faire l'impasse sur le surplus pour avoir plus du second. Je reconnais cependant que, comme Merome, je me trouve dans une situation privilégiée à ce niveau...

En tout cas je pense que je vais y prendre goût.

3. Le dimanche, 2 mai 2010, 11:18 par Merome

@Agase : Le jeudi, jusqu'à maintenant, mes enfants étaient à la garderie dès 7h30 et mangeaient à la cantine le midi. Maintenant, ils se lèveront à 7h30, déjeuneront tranquillement avec moi et je les emmènerai à l'école pour 8h30 pour les récupérer de 11h30 à 13h30 et on mangera ensemble. Chaque matin, jusqu'à maintenant, je chevauchais mon vélo au moment où eux se levaient. Je ne déjeunais pas avec eux. Maintenant, je pourrai. Et toute l'organisation interne de la maison va se trouver remaniée, qui fait les courses et quand (voire où ?), du temps en plus pour entretenir la maison (tondre la pelouse, faire le ménage, ...) en l'absence de mes enfants, me laissant d'autant plus de temps avec eux pour faire les devoirs sans pression ou jouer plus, les emmener au cinéma ou à la bibliothèque (en vélo !).

Comme je le dis déjà dans l'article, ce temps en plus est aussi pour moi, égoïstement. Du temps pour mener à bien des projets qui me sont chers, qu'ils soient personnels ou tournés vers les autres. J'aurai l'occasion d'en reparler ici. En fait, je crois que j'ai déjà bien plus de 20% de trucs à faire en plus !

@Bob : Si ton passage à l'acte a précipité mon choix, j'avais l'idée depuis bien longtemps déjà. Mais merci quand même :)

Il est prouvé que la réduction du temps de travail augmente l'efficacité et la productivité. Et le corollaire qu'on nous apprend aussi dans les stages de managements (dont je suis friand, il va sans dire), c'est que le temps est élastique : si tu as 8 heures pour réaliser une tâche qui n'en prendrait que 2 ordinairement, inconsciemment, tu vas t'arranger pour que ça tienne huit heures. La nature (humaine) a horreur du vide. C'est surtout vrai, je pense, quand l'initiative personnelle est très peu encouragée, ou très peu possible, dans l'entreprise. Dans le cas contraire, pour un auto-entrepreneur, ou un artisan à son compte, par exemple, ça doit être l'inverse qui se produit : moins on a de temps, moins on fait de choses...

4. Le lundi, 3 mai 2010, 15:46 par Z

Clap clap !

Belle illustration de ce que tu évoques dans ton billet précédent (et dans d'autres billets encore avant) :
"La désobéissance se doit d'être individuelle. Il faut cultiver l'art du contrepied et être là où on ne nous attend pas."

Désobéissance face au dogme croissanciste, et parfait contrepied du cynisme matérialiste sarkozyste : travaillons moins pour gagner moins !

5. Le mercredi, 5 mai 2010, 16:30 par Nath

Je passe aux 4/5è itou !
Je profite du congé parental pour m'octroyer une pause le mercredi (j'espère). Je ne garderais pas mes louloux ce jour là, mais en profiterais pour organiser des sorties seule avec l'un d'entre eux alternativement.
Et le reste, ce sera pour moi et pour toutes les tâches ménagères et administratives qu'il vaut mieux être seul pour réaliser...

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