Amis philosophes, intéressons-nous aujourd'hui à la notion de superflu

Celui qui s'inquiète d'écologie finit toujours par s'interroger sur ce qui est superflu. Le problème est que cette notion est fortement variable, selon plusieurs paramètres.

D'abord, le superflu change selon l'époque. En 1900, avoir une voiture était superflu. En 1950, en avoir deux par foyer était superflu. En 1980, avoir la climatisation était superflu. Aujourd'hui, l'aide au stationnement ou le chauffe-nuque sont superflus. Qu'en sera-t-il demain ?

Le superflu change également selon les circonstances. Un téléphone portable ne sert à rien dans un cinéma, dans un hopital où il doit être éteint, et il peut en revanche s'avérer fort utile quand on est en panne sur une route déserte, quand un de nos enfants est de sortie et souhaite nous joindre...

Le superflu varie aussi selon les gens. Un chauffeur de taxi et un camionneur ont besoin d'essence pour travailler. Le forestier a besoin d'un 4x4. Les handicapés d'un ascenseur.

On peut, j'en suis sûr, trouver mille autres paramètres qui vont faire que le superflu des uns sera l'indispensable des autres, et vice versa.

À partir de là, comment dessiner les contours d'une société plus sobre et écologique. Qui va arbitrer les désirs et les besoins de chacun et selon quels critères objectifs ?

Je n'ai pas de réponse à la question, mais une piste de réflexion :
Que chaque objet, équipement, service, soit payé à son vrai coût. Ce que j'appelle le vrai coût, c'est celui qui intègre le prélèvement de matière première par rapport au stock disponible et à sa régénération, l'énergie nécessaire à la fabrication et l'acheminement du produit chez le client final, le coût induit par son utilisation, et par son recyclage ou sa réutilisation.
Cela aura deux effets mécaniques : l'augmentation générale des prix des produits les moins sobres et la recherche pour les industriels comme pour les clients de produits et services plus écologiques.

L'inconvénient majeur de cette façon de procéder, c'est de réserver, de fait, aux plus riches l'accès aux activités les plus polluantes (qui peuvent être parfois les plus "intéressantes"). Une sorte d'écologie à deux vitesses, comme on dit. Est-ce vraiment un problème ? À partir du moment où le principe du pollueur-payeur est respecté, il me parait sain de laisser le libre accès aux produits et services très gourmands en ressources où en énergie, pour éviter des aberrations qui ne manqueront pas d'apparaître si l'on interdit purement et simplement les 4x4, les piscines et les jacuzzis.

Il ne vous a pas échappé qu'on n'est pas loin du principe de la taxe carbone. A la différence près que la taxe carbone ne s'inquiète, comme son nom l'indique, que du problème du CO2 émis, mais pas de la ressource éventuellement gaspillée, ni du retraitement des produits hors d'usage où leur impact pendant leur utilisation.

La grosse difficulté est de trouver la formule magique pour évaluer le "vrai coût". Idéalement, il faudrait également qu'il intègre les conditions sociales dans lesquelles le produit a été fabriqué, ou dans lesquelles le service rendu. Je pense qu'à partir de l'estimation que l'on a des ressources disponibles de matière premières et d'énergie, et en définissant un barême, certes arbitraire, mais ajustable, pour les conditions sociales, il y aurait déjà une base de travail tout à fait acceptable.

Qu'en pensez-vous ?

Commentaires

1. Le mercredi, 14 avril 2010, 20:56 par agase

C'est une idée

Je pense que déjà on fait payer les matières premières plus ou moins à leur vrai coût à l'exception d'une, le pétrole.

Et je pense que tous nos écarts viennent principalement de là.
En effet, le pétrole facilite l'extraction des matières premières en actionnant des machines surpuissantes (mines, agriculture,...)
Le pétrole facilite le transport en actionnant des moyens toujours plus rapides et performants.

Si on paie le pétrole à son vrai coût, toutes les étapes de la production des biens seront plus chères et donc le prix final le sera également.

Maintenant, est-ce une bonne solution. Oui je le pense et cela pourra peut être redorer le blason du travail mais rien n'est moins sur. En effet, le facteur aura-t-il envie d'abandonner sa voiture et de revenir au vélo ? seront-nous prêts à attendre plusieurs jours une commande faite sur internet où aujourd'hui elle arrive en 24h ?
Il faudra que cela s'accompagne également d'un changement de mentalité.

2. Le jeudi, 15 avril 2010, 01:22 par Fil

C'est dommage, l'article commençait bien. :)
Jusqu'à ce que tu trouves une piste biscornue à une question dont la réponse me parait inéluctable si l'on se rend bien compte que d'ici 2050 on sera 10milliards d'humains. 10 milliards d'opinions, d'intérêts différents, de voies de plus en plus individuelles.

La réponse à ta question "Qui va arbitrer les désirs et les besoins de chacun et selon quels critères objectifs ?" : La loi de l'offre et la demande.
Cette loi est passée, passe toujours et passera avant tout le reste et si rationnement de produit il doit y avoir pour cause de manque de matières premières ou d'énergies, alors ces changements de mode de consommation se produiront à ce moment-là
Et à ce moment-là alors, ce qui sera cher à fabriquer sera cher à acquérir car rare.

Ca passera par des conflits, surement des guerres, en 2050, ça fera plus d'un siècle qu'il n'y aura pas eu de conflit majeur, d'ici là, les hommes auront "oublié" les ravages des précédents et n'hésiteront pas à remettre le couvert. Pessimiste ? Je crois pas, sinon j'aurai dit une date bien antérieure à 2050, genre 2012, 2015, 2020...

3. Le dimanche, 25 avril 2010, 18:37 par swirly

agase a dit :

"Je pense que déjà on fait payer les matières premières plus ou moins à leur vrai coût à l'exception d'une, le pétrole."

Non, pas du tout. Lorsque l'on paye une matière première, on paye uniquement le travail nécessaire à son extraction, mais on ne paye absolument rien de ce qui concerne la diminution du stock disponible pour une matière première non renouvelable.

Par exemple, si on extrait du cuivre, on va payer les ouvriers, les machines, les taxes éventuelles de l'état, mais rien en ce qui concerne le cuivre lui même.

C'est d'ailleurs cette absence de cout qui conduit au gaspillage généralisé.

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