Quels points communs entre La princesse et la grenouille, Avatar, les musiques préférées des TricTraciens et Oniris ?

Parfois les articles se construisent comme ça : une petit brique piochée ici et là, et tout d'un coup une brique finale qui vous oblige à faire une synthèse. La brique finale, cette fois, c'est la Princesse et la grenouille, que j'ai vu hier soir avec ma famille.

Je salue l'audace de Disney qui propose un dessin animé en 2D à contre courant de ce qui se fait maintenant. Une fois l'audace saluée, il reste un sentiment plutôt mitigé sur la réalisation : on distingue nettement la différence entre le décor (mat et flou) et les personnages (qui brillent et sont nets), et par ailleurs les travellings sont pénibles à regarder, car ils sont saccadés.
Après cette première déception en vient une seconde : ça chante exagérément. Pour ne pas dire "tout le temps". Pire encore, les chansons sont toutes dans une tonalité jazz/blues new orleans, qui collent parfaitement au thème, mais qui sont désagréables à mes oreilles.
Troisième déception, le scénario, médiocre, et les personnages peu attachants. Nous avons une fille pauvre qui se réfugie dans le travail pour réaliser son rêve, une fille riche et superficielle qui fait la cruche en attendant le prince charmant, un prince charmant vantard et arriviste, un valet cupide et revanchard, un méchant qui est juste méchant, ... Il y a juste le crocodile joueur de trompette qui attire la sympathie, grâce à sa bonne bouille et ses réparties. Qui plus est, pendant les trois quarts du film, les deux héros sont transformés en grenouilles moches et sans attraits.

Mais ce qui m'a le plus gêné dans ce dessin animé, c'est cette tentation qu'ont les auteurs actuels d'essayer de faire oublier le monde réel. Je n'ai pas vu Avatar, et je me garderai donc bien de faire la critique du film (et m'attirer ainsi les foudres de 12 millions de français), mais j'ai cru entendre que le monde que James Cameron dépeignait n'était pas tout à fait réel ou réaliste.

Je regrette aujourd'hui que les spectateurs cherchent à fuir la réalité. Au lieu de changer le monde, ils cherchent à l'oublier. Bien sûr, la plupart des créations artistiques sont des fictions. Mais certaines fictions nous apprennent plus sur la réalité que le journal télévisé lui-même. Ce n'est pas le cas de la princesse et la grenouille, ni apparemment d'Alice aux pays des merveilles de Tim Burton, dont j'ai vu la bande annonce et qui ne m'attire pas plus.

Et en réfléchissant un peu, je me suis rendu compte que je me heurtais régulièrement à ce détachement de la réalité souhaité par les gens.

Sur ce topic du forum Tric Trac, je m'étonnais par exemple du fait que la musique préférée des joueurs francophones qui fréquentent le site était quasi exclusivement anglophone.
Personnellement, lorsque j'écoute des chansons anglophones, je ne comprends rien aux paroles, ce qui ne m'empêche pas d'apprécier, mais m'empêcherait clairement de mettre ça dans mon "top de l'année".
La musique est consommée comme une évasion de la réalité et non comme une façon d'élever son niveau de conscience.

Même constat sur Oniris. Oniris est un site belge que j'ai trouvé récemment et qui se propose de recueillir les textes d'auteurs amateurs (nouvelles et poésies) et de les faire lire à un comité de lecture avant de les publier (ou non, selon la qualité) sur le site.
J'ai soumis trois des textes que j'avais déjà publiés sur le blog, et un seul a été retenu. Les remarques qui m'ont été faites sont par ailleurs tout à fait recevables et m'aideront sans doute à progresser. Mais en consultant le classement des meilleures poésies, j'ai été frappé de voir l'abstraction nécessaire à la lecture de l'une d'entre elles (voir mes commentaires au bas de la page).
Là aussi, ce n'est pas tant le sens qui est important pour les lecteurs, mais la seule magie des mots, leur musique. C'est dommage, car je pense qu'on pourrait avoir les deux, des mots qui sonnent ET qui veulent dire quelque chose. Mais au vu des commentaires, il semble que si les textes se rapprochent trop de la réalité, ils déçoivent les lecteurs du site.

"Plutôt que de fuir la réalité, changez là", c'est ce que j'aimerais faire passer comme message. C'est trop facile de déconnecter du monde et d'oublier ses misères et ses dysfonctionnements. Regardez les choses en face et agissez.

Commentaires

1. Le dimanche, 7 février 2010, 11:12 par Stef

Il y a un temps pour le JT (ou tout moyen de (des)information...) et un temps pour le divertissement. Si je vais au ciné pour me changer les idées et qu'on me colle 1h30 pour décrire la situation sociale du pays ou le réchauffement climatique, ça va me gonfler.
Aller voir Disney, ce n'est pas la même démarche qu'un Michael Moore ou "Home".
Autant je te rejoins sur l'idée que les changements de comportements individuels sont la base des évolutions de notre société, autant je trouve que tu es sur ce coup hors-sujet.

2. Le dimanche, 7 février 2010, 12:12 par Merome

Stef : Mon propos n'est pas exactement celui-là. Je ne dis pas qu'il faut aller voir que des documentaires catastrophistes. Je dis qu'il serait plus intéressant de profiter de la fiction pour avancer sur le réel. On touche à nouveau aux goûts et aux couleurs, mais personnellement, la princesse et la grenouille ne m'a rien apporté, alors que Wall E m'avait énormément apporté. On ne peut pas dire que Wall E est réaliste, mais il garde malgré tout une connexion avec la réalité. Or, j'ai l'impression que pour certains, c'est cette connexion à la réalité qui gêne. Je m'inquiète qu'on cherche de plus en plus à éviter le réel.%%%
On pourrait aussi faire allusion à ceux qui se mettent minable tous les samedi soirs. C'est aussi une fuite.

3. Le dimanche, 7 février 2010, 14:43 par Nelly

Avatar... C'est LE film que tu dois aller voir, en famille, compte-tenu de ta fibre verte. Les messages véhiculés sont, à mon très humble avis, très intéressants, et suscitant le débat, en famille : David contre Goliath, la nécessité de respecter notre planète, le handicap...
Peut-être suis trop "bon public" et pas assez critique, cependant, pour moi Avatar est vraiment très très bon, un peu trop "téléphoné" pourtant, comme on dit pour être ché-bran. L'éloignement de la réalité est un moyen de faire rapidement des comparaisons terre-à-terre...
Océans aussi est très un très bon film (et pourtant mer-à-mer.. Oui, bon...) bien que trop dur pour une séance familiale. Je m'en suis rendue compte trop tard, en prenant le parti de boucher les yeux de mon "6ans".
L'important est l'émotion (etc) que les œuvres suscitent, non ?

4. Le lundi, 8 février 2010, 08:32 par Merome

@Nelly : Avatar ne m'attire pas. Désolé. Bien sûr que l'émotion que cela suscite est importante. Mais si cette émotion n'est pas "transposable" dans le réel, à quoi sert-elle ? Je répète que je suis sensible à beaucoup de fictions et de mondes montés de toutes pièces, s'ils sont cohérents et qu'ils permettent une transposition à notre quotidien. Ecouter une chanson en anglais (avec mon niveau !) ou m'enivrer une soirée (ok, c'est pas mon genre), ça va me faire oublier mes soucis pendant quelques minutes, mais ça ne va pas changer ma vie ni le monde qui m'entoure. Si je ressens le besoin de m'extraire de la réalité, c'est qu'il y a des choses à améliorer. Elles ne vont pas s'améliorer toutes seules !

5. Le lundi, 8 février 2010, 08:59 par agase

Toi qui est un fan de Matrix ! (que tu viens de revisionner je crois)

Où est la réalité ? Si là ce n'est pas s'évader du réel je ne sais pas ce qu'il faut !

oui je sais je trolle

6. Le lundi, 8 février 2010, 13:41 par Merome

@agase : J'ai bien dit qu'il y avait des fictions qui retenaient toute mon attention. Matrix en fait partie. En regardant Matrix, j'ai le sentiment d'apprendre des choses sur moi-même et sur la société. Peut-être que c'est le cas d'autres oeuvres que je ne comprends pas. Mais je n'arrive jamais à trouver quelqu'un pour me l'expliquer...

7. Le lundi, 8 février 2010, 15:08 par agase

Ce que tu éprouves pour Matrix, d''autres l'épouvrent pour d'autres oeuvres. Pour certains ce sera Avatar, pour d'autres un bon Walt Disney et pour beaucoup rien du tout. Je penses faire partie de cette troisième catégorie.

Perso, le ciné, ca me sert juste à me divertir, je ne vais rien y rechercher d'autre. (Un peu comme Stef). Peut être parfois, le récit sur un évenement ou un homme du passé (Invictus). Je le prends toutefois avec des pincettes car raconté par l'oeil d'un réalisateur qui va y mettre sa propre vision parfois très déformée.

Mais le cinéma reste pour moi seulement un moyen de divertissement et oui je pense perso que le jour où les films raconterons ma réalité, je n'y mettrai plus les pieds.

@Nelly : perso, j'ai trouvé qu'Avatar était simplement un bon film d'aventures et c'est la performance des effets spéciaux qui m'a le plus attiré. Les messages écologiques, sociaux ne m'ont en revanche pas du tout marqué. Mais comme je le dis au début du post, chacun est unique et y verra ce qu'il veut.

8. Le lundi, 8 février 2010, 15:12 par Stef

Merome :"Or, j'ai l'impression que pour certains, c'est cette connexion à la réalité qui gêne". Ce n'est pas mon cas et je ne sais pas si ça "gêne" vraiment, du moment que le divertissement est bon. Je dis juste que ce n'est pas "nécessaire" pour la grande majorité des gens qui cherchent juste un divertissement, de là a y voir un échappatoire, la conclusion me semble hâtive. Pour la chanson, c'est pareil, je suis sensible au rythme, aux voix, aux instruments, les paroles viennent en dernier. Je peux adorer une chanson entrainante sans aucun message (pas trop débilissime quand même).
Au passage, ta comparaison avec l'alcoolisme du samedi soir est mal choisie a mon avis, ceux qui se torchent tous les samedi ne cherchent pas forcément a fuir la réalité, c'est plutot un profil de gens qui ne savent pas s'amuser sans boire (c'est triste aussi...). Celui qui boit pour échapper a la réalité c'est l'alcoolique chronique, celui qui picole dés qu'il rentre du boulot, tous les soirs.

9. Le lundi, 8 février 2010, 15:28 par Merome

Plus j'y repense, plus je trouve que cet article traduit assez mal ce que je voulais faire passer. On y lit entre les lignes que tout ce que les autres aiment et que je n'aime pas, c'est de la merde. C'est loin d'être mon point de vue. C'est plus une critique de la "facilité", reste à définir ce qu'on range derrière ce mot, et je suis infoutu de le faire correctement pour l'instant.

10. Le lundi, 8 février 2010, 15:59 par Nelly

@Agase : Avatar m'a plu comme divertissement, et les effets 3D sont époustouflants. Toutefois, j'essaie de faire travailler la critique de mon fils dès la sortie du film. Ce qui ressort de la réflexion de mon "6ans" à la sortie d'Avatar, n'avait rien de comparable à la réflexion qu'il pouvait avoir en sortant d'un film d'animation "standard". Mon fils a été marqué par ce film, et pour moi c'est très important.
@Merome : A mon avis, tu aimes plus la science-fiction crédible que l'heroic fantasy basée sur l'imagination... Voilà pourquoi tu n'accroches pas. Il n'empêche que l'on peut tenter d'essayer de changer la réalité, tout en appréciant de se divertir avec des œuvres du genre fantastique. Je suis moins engagée que toi, cela dit...

11. Le lundi, 8 février 2010, 16:08 par agase

Merome,
Si j'ai bien compris : tu ne veux pas qu'on aime ce que tu aimes ; mais que les actes de chacun ai un sens pour le bien de "l'humanité" (reste à définir ce qu'on met derrière le mot humanité :)). Ce raisonnement irait bien avec le reste du blog.

Si c'est bien ça : tu réflechis trop !
Il faut dans chaque être humain, je pense pour qu'il puisse s'épanouir, un espace de liberté qui n'aura aucun sens pour les autres.

Regarde, je fais de la course à pied. dans quel but ? moi même parfois, je me demande pourquoi mais j'y trouves surement la satisfaction de me dépasser. Toi, c'est peut être dans l'écriture ?
Chacun est différent et heureusement. Ne cherche pas à rendre le monde insipide.
Tu te trompes de combat si tu veux que tous les actes aient un sens.

12. Le lundi, 8 février 2010, 17:25 par Merome

@agase : pas mal analysé, je pense que tu es proche de la vérité. Mais il m'arrive de temps en temps de poser mon cerveau, moi aussi, ce qui m'inquiète peut-être, c'est une tendance à la systématisation de la chose dans nos sociétés. La vie est pourrie, mais elle devient supportable si on arrive à s'en échapper le temps d'un film, d'une beuverie, ou d'une musique déjantée. Et j'ai peur que ça dérive sur un individualisme, mauvais cette fois, où chacun trouverait son compte dans un loisir ou l'autre, sans chercher à améliorer le sort de son prochain, fût-il son propre gosse.

13. Le mardi, 9 février 2010, 00:17 par Stef

C'est plus clair comme ça. :)

"On y lit entre les lignes que tout ce que les autres aiment et que je n'aime pas, c'est de la merde." : Non, je n'avais absolument pas supposé que ce soit ton point de vue, mais j'avais pris l'article pour une critique systematique des loisirs qui permettent au cerveau de s'échapper.
Ton dernier post (le 12) précise assez bien ta pensée. Comme pour tout, l'abus est dangereux. Un bon Star Wars ma branche plus a 21h qu'un documentaire sur le trou de la Sécu, mais je ne suis pas du genre a zoner devant la télé pour oublier mes soucis pour autant.

14. Le mardi, 9 février 2010, 07:58 par etheriel

Tu veux de la réalité ? Un truc transposable dans la vraie vie ? Ca fait des mois que je te propose de regarder The Shield, série on-ne-peut-plus réaliste, sans effets spéciaux, sans la moindre trace de SF, qui retrace la vraie vie d'un quartier pourri de Los Angeles...

15. Le mardi, 9 février 2010, 08:05 par Merome

@Stef : il faut plus que j'écrive le dimanche matin après une mauvaise nuit.

@etheriel : spam

16. Le mardi, 9 février 2010, 09:46 par Nath

Tu as un petit côté rabat-joie parfois Merome ;)
Pour en revenir à la Princesse Grenouille, je m'étonne que tu n'aies pas tiqué sur le message très sarkosyste du DA : "travailler plus pour réaliser ses rêves". Si ce n'est pas transposable à la réalité ça ! Mais peut-être que justement ça ne va pas vraiment dans le sens de ce que tu prônes.
Pour l'anecdote, suite à ce DA, ma fille de 5 ans m'a demandé si en priant une étoile elle pourrait se transformer en garçon. Je lui ai alors répondu que ça ne suffirait pas. Et mon fils de 7 ans et demi a ajouté "et oui, il faut aussi travailler".

17. Le mardi, 9 février 2010, 10:01 par Merome

@Nath : Cela fait partie des raisons pour lesquelles le personnage de Tiana n'est pas attachant. Rabat joie, ouais, sans doute un peu. Désolé.

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