Quelques réflexions mal construites et peu argumentées sur les finances publiques

C'est la lecture de cet article de Jean-Michel Aphatie qui m'évoque quelques pensées que je souhaitais partager avec vous.

Le journaliste de RTL a pris l'habitude d'alerter les auditeurs sur la dette colossale que creusent les gouvernements français depuis que le monde est monde, ou presque. Il n'a pas tout à fait tort, même si l'on ne peut pas tenir le budget d'un pays comme on tient le budget d'un ménage, notamment parce que l'Etat a la possibilité de lever l'impôt pour combler les trous.
Encore faut-il prendre l'argent là où il est, et l'utiliser correctement.Et là dessus, il y a des choses à dire. Jean-Michel Aphatie en oublie certaines.

On a tous son idée géniale pour utiliser au mieux l'argent du contribuable. Ce qui me parait irréaliste, c'est de vouloir faire toujours plus avec moins. Toujours plus, c'est la recherche perpétuelle de croissance qui nous l'impose. Une croissance qui n'amène pas forcément de bien-être ni même de richesses. Prenons les dépenses de communication, par exemple, c'est un budget qui, partout, augmente, sans jamais, nulle part, apporter de mieux être. Dépenser plus d'encre et de feuilles pour faire plus de plaquettes et d'affiches que les gens ne liront pas plus...

Cette tendance générale à faire toujours plus et mieux qu'avant s'auto-entretient. Quand tout le monde autour de vous court dans le même sens, rester immobile est déjà un effort. Si la tendance générale était au raisonnable et à la sobriété, c'est celui qui dépense qui serait regardé de travers.
Dans les entreprises, la taille d'un service est jugée à la quantité d'argent qu'il brasse. Et le chef de service a d'autant plus de pouvoir et de reconnaissance qu'il manipule des grosses sommes. Cet encouragement à la débauche financière est, en soi, le problème.

L'Etat dépense donc de l'argent, de plus en plus. Pour faire des lois qui ne sont pas appliquées, ou qui font doublon avec d'autres lois. L'Etat invente des mécanismes compliqués qui demanderont une armée de fonctionnaires pour les faire fonctionner. Par exemple la taxe carbone. On prélève une taxe, mais on la redistribue en crédit d'impôt. Efficacité nulle. Complexité totale.
D'un côté, on encourage l'acquisition de mode de chauffage propre, par l'attribution d'un crédit d'impôt, mais de l'autre, on donne une "prime à la cuve" pour ceux qui restent au fuel. On prête de l'argent aux constructeurs automobiles pour qu'ils mettent en oeuvre des véhicules propres, mais on propose une prime à la casse pour acheter des véhicules encore (trop) sales.

L'Etat paye et repaye tout, deux fois, trois fois. Subventionne les entreprises. Allège les impôts. Augmente les services. Invente de nouvelles lois. Et il faut tout ça avec de moins en moins d'argent disponible. Pire : le capital écologique est maintenant atteint. Nous creusons la dette autant que nous creusons notre tombe, à la pelleteuse.

Dans une société orientée vers la sobriété, les pauvres ne seraient pas plus pauvres. La sobriété enrichit ceux qui la pratiquent, quel que soit leur niveau de revenu. Une taxe carbone efficace est une taxe payée par tous au niveau de leur consommation. Seul moyen de valoriser les comportements vertueux. La première écologie, c'est d'abord de faire moins. Et ça, c'est accessible à tous ceux qui ont les moyens de faire quelque chose.

Commentaires

1. Le mardi, 6 octobre 2009, 16:26 par _Fil_

La sobriété n'est pas dans la nature humaine. Du moins pas dans la société "de masse".
Et la régression ("faire moins", on s'accorde que c'est régresser ?) est fuie, à juste titre selon moi, comme la peste. Chacun essaie de s'améliorer, on se s'améliore pas en faisant moins, on s'améliore en faisant autrement au minimum.

2. Le mardi, 6 octobre 2009, 19:44 par Merome

_Fil_ : La sobriété n'est pas dans la nature de l'homme de la société de consommation. Il ne faut pas entendre par sobriété refus de progrès ou d'évolution. C'est parce que nous sommes tous shootés à la croissance qu'on croit que c'est la seule voie possible. Ce que j'ai essayé d'expliquer avec mon image des gens qui courent tous dans le même sens et qui empêchent les quiconque de rester immobile.

3. Le mardi, 6 octobre 2009, 20:27 par Arkh

"On a tous son idée géniale pour utiliser au mieux l'argent du contribuable."
Dites, avouez que vous avez lu "the road to serfdom" de Hayek.

Bon sinon, au moins un sujet sur lequel on peut s'accorder : l'état français utilise la thune qu'il n'a pas à tort et à travers.

Maintenant, les gens qui souhaitent rester immobiles et ne pas céder à la société de consommation le font. Les amish, moines, certains hippies qui ont créé leurs propres havres. Mais oui, cela demande un effort.

4. Le mardi, 6 octobre 2009, 20:49 par Merome

@Arkh : Désolé, je ne sais pas lire. Enfin, presque.

5. Le mercredi, 7 octobre 2009, 14:10 par _Fil_

La société de consommation date de quand alors ?

Parce que des plus anciens empereurs Grecs, en passant par Jules César, François 1er jusqu'à Napoléon, niveau breloques et choses qui brillent on n'a jamais donner dans la sobriété je crois. Plus t'en as, plus t'en veux. Ca ne date pas de la société de consommation je pense.
Même le plus ancien homme préhistorique a toujours chercher à avoir plus : de nourriture, de confort, etc...

6. Le mercredi, 7 octobre 2009, 15:47 par Merome

_fil_ : je comprends bien ce que tu veux dire. Mais entre "plus" et "toujours plus", il y a un seuil à ne pas franchir, celui de l'empreinte écologique. Evidemment, une société idéale, va toujours chercher à "progresser", et à avoir "plus de confort". Mais cela n'a de sens que si l'on prend en compte le problème de façon globale. Si pour avoir une richesse de plus, je dois diminuer l'espérance de vie de mon voisin (par exemple, en le butant pour avoir sa caisse ou sa montre), il se pose un problème moral, d'une part, et le monde ne s'est pas globalement enrichi d'autre part. Aujourd'hui, consciemment, nous diminuons l'espérance de vie de nos (petits) enfants (et je ne parle même pas des habitants des PVD), sans se poser la question morale une seule fois, et au détriment de toute réflexion sur l'enrichissement global.

7. Le mercredi, 7 octobre 2009, 17:45 par Arkh

@Merome
Vous devriez sincèrement lire un peu de Hayek et de Mises. Parce qu'une partie de ce que vous dites est au cœur du libéralisme (entre autres, ne pas empiéter sur les droits naturels des autres, le progrès qui passe par une utilisation plus intelligente des ressources etc.). Il semble qu'il n'y a que sur la partie sauvegarde des générations futures que nos avis divergent : pour vous il faut économiser, pour moi il faut investir (et pas à crédit).

8. Le mercredi, 7 octobre 2009, 19:08 par Merome

@Arkh : Libéralisme ? Hmm, d'emblée, comme ça, je ne trouve pas que ça me correspond tout à fait...

9. Le jeudi, 8 octobre 2009, 09:46 par marzi

"Mais entre "plus" et "toujours plus", il y a un seuil à ne pas franchir, celui de l'empreinte écologique. " => pour reprendre le débat engagé par Fil, l'homme préhistorique aurait pu consommer 10 fois plus que le ricain moyen, ca n'aurait eu aucun impact sur l'empreinte ecologique. Parce qu'au delà de la folie consumériste de notre siècle, la population mondiale toujours grandissante a évidemment son impact sur la chose.

Mais chut, c'est tabou, faut pas le dire !

10. Le jeudi, 8 octobre 2009, 15:54 par Merome

En plus d'être tabou, c'est un paramètre sur lequel on ne peut influencer efficacement, sauf guerre, extermination massive, génocide. C'est avant tout pour ça qu'on n'en parle pas. On peut s'amuser à demander aux gens de faire moins d'enfants. Dans une cinquantaine d'années (trop tard pour les problèmes dont on parle), on commencera seulement à percevoir les résultats et on aura une population vieillissante bien incapable de faire les changements radicaux de mode de vie qui seront nécessaires.

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