Hadopi, Frêche, Eolas, les élus, la lettre ouverte et mon pied dans les noix

L'article qui suit devrait parler de tout ça et je n'ai pas réussi à trouver un titre fédérateur...

Vous vous étonnez peut-être (mais vous vous foutez sûrement) de la dramatique non-avancée de mon projet de lettre ouverte aux élus en forme d'appel à la désobéissance économique.

Je dois admettre que dès la rédaction de ladite lettre, j'étais plutôt sceptique sur le bien fondé et l'intérêt de la chose, toujours plus convaincu que je suis que les élus ne servent plus à rien, ou sont impuissants ou tellement crétins, que leur mettre le nez dans leur caca ne sera pas plus productif que d'uriner dans un stradivarius.
Je l'avais néanmoins écrite comme un "dernier espoir" ou une "dernière chance" de leur faire confiance. Oh, je ne leur en veux pas personnellement, enfin, pas à tous, mais c'est plutôt le système qui est mal foutu de bout en bout. De plus en plus, j'ai l'impression qu'on est au bout d'un cycle, que cela soit économiquement, politiquement, écologiquement ou socialement, et que par conséquent, la plus anodine des organisations de notre société, la plus simple des initiatives est totalement à la rue.

Rien qu'aujourd'hui, une tripotée d'informations dont j'ai pris connaissance m'ont paru aller dans ce sens, je vais vous en faire part et vous me donnerez votre avis ensuite, il m'intéresse.

Commençons par Georges Frêche, élu PS à la réputation fachisante, et à l'occasion, volontiers blagueur ou cynique sur les tenants et aboutissant de son métier de politicien. Je vous invite à écouter ses propos :



Ça déboite, hein ? Le pire, c'est qu'il n'a pas tout à fait tort, je le crains. On a les politiciens qu'on mérite, d'où mon insistance à faire passer le message de l'importance de l'action individuelle et de la bonne éducation/information. C'est parce qu'on est des cons que les hommes politiques nous prennent comme tels et nous fabriquent des lois assorties. Mal informés, trop égoïstes et inconscients, nous n'avons pas encore pris la mesure de la société telle qu'elle existe aujourd'hui. Les problèmes économiques, sociaux, environnementaux ... nous échappent parce que nous sommes aveuglés par la recherche de notre confort personnel et souvent dérisoire.

Parmi ces lois à la con qui arrivent par paquet de douze ces temps-ci, il y a celle qu'on appelle Hadopi. Après la LCEN, le DADVSI, on nous explique à nouveau que l'internet, c'est le Mal.
La quadrature du Net contre-attaque en proposant de repeindre en noir les sites web et les blogs pour montrer son désaccord, et invite à prendre contact avec les députés pour leur expliquer tout le bien qu'on pense de cette loi (la méthode vous rappelle quelque chose ?).

Maitre Eolas, a gardé son site sur fond blanc et il explique, avec son talent habituel, pourquoi il ne le repeindra pas en noir. Je vous cite un extrait :

Mais, et cela vaut aussi pour l'avenir, je ne me joindrai jamais à un de ces collectifs qui substituent à l'action politique le comportement moutonnier

En substance, Maitre Eolas explique que spammer les députés avec des arguments dont ils se tamponnent allègrement sur un sujet auquel ils ne comprennent rien est contre productif. Tout au plus, les médias s'en empareront et tenteront d'expliquer à la ménagère de moins de cinquante ans que télécharger n'est pas tromper, mais cela ne fera pas avancer le débat politique d'un iota.
Il préconise au contraire de cibler les députés intéressés par le dossier, et surtout ceux qui appartiennent à la majorité et sont pourtant plutôt contre. Ils connaissent le dossier et sont peut-être à la recherche d'arguments imparables et d'angle d'attaque pour rédiger d'autres amendements.

Les commentaires sous ces deux billets du Maitre sont tout aussi riches d'enseignements, on y voit les deux méthodes de contestation (celle de la Quadrature et celle d'Eolas) s'opposer et montrer leurs limites respectives. Au final, pas grand chose ne change, que la contestation soit forte ou confidentielle, le débat démocratique est devenu quasiment inutile. Le plus simple pour influencer quelque chose serait encore de devenir soi-même député, mais il y a de bonnes chances que le rite initiatique pour y parvenir, à la Georges Frêche, vous ôtes toute envie de changer le monde (en bien).

On se heurte aux limites de notre système démocratique. Tout le monde a l'impression de subir la pression des lobbys, qu'ils soient industriels ou médiatiques. Chacun défend son pré carré, avec l'absence totale de vue d'ensemble ou à long terme.
Le secteur automobile est sous perfusion, maintenu artificiellement en vie alors que son sort sera scellé par la fin du pétrole bon marché qui arrive à grands pas.
L'industrie du disque, qui n'a plus de sens à l'heure du téléchargement et de l'écoute des morceaux de musiques sur de multiples plateformes hétérogènes, est défendue par des lois inadaptées.
On continue de chercher la relance, la croissance dans un monde trop petit pour nous.
Les journalistes continuent de colporter les discours politiques sans esprit critique...

A notre niveau, on peut vraiment s'interroger sur les bonne méthodes d'action. Je reste persuadé qu'être moins con est un préalable essentiel et c'est là-dessus que je travaille, et en ce qui me concerne, il y a du boulot ! Il faut que l'information, la vraie, le débat démocratique, ait lieu partout et sans le prisme des médias ou des politiques. Les citoyens, c'est nous. A nous de nous réapproprier le débat et cela commence par en parler autour de nous, que cela soit aux repas de familles ou sur les blogs.

Si vous avez de meilleures propositions, de chose qu'on peut faire à notre niveau pour arriver peut-être à cette société idéale, je vous écoute avec attention.

Commentaires

1. Le mardi, 10 mars 2009, 23:48 par François Granger

Partageons nos idées d'un monde meilleur ?
lucioletome2.com/dotclear...

2. Le mercredi, 11 mars 2009, 08:48 par ElDiablo

Très bon résumé, j'insisterai simplement sur le fait que TOUT va découler de la fin du pétrole / énergie gratuit (dans le sens pas cher).

Un "reset" de la société pour aboutir à une V2, avec une transition douloureuse mais nécessaire.

3. Le samedi, 14 mars 2009, 10:45 par plutonius

La fin du pétrole fait partie des "informations" relayées tant par les politiques que leurs médias... A vrai dire, pour ceux qui ont connu cette époque, on nous a déjà fait le coup (dans les années 70) avec la même recette pour en sortir : une énergie "propre", écologique et verte (enfin, faut pas regarder de trop près quand même :P ), le nucléaire. la société V2 comme dit ElDiablo elle est déjà dans les bagages de Sarkostique à chaque déplacement à l'étanger : elle s'appelle Areva (les EPR), Thalès, EADS (pas grand-chose à voir avec l'énergie mais on n'est pas 4ème exportateur d'armes pour rien).

Discuter autour de soi, convaincre un à un ses interlocuteurs, je suis assez d'accord vu que ça fait quand même plus de vingt ans (ça me rajeunit pas tout ça) que je le fais, sur des sujets divers et variés touchant tant à la politique qu'aux médias. A vrai dire, c'est payant, à la longue et c'est bien là que le bât blesse : un peu trop long dans un monde où le temps est devenu une denrée rare (vous ne dites jamais "j'ai pas le temps" vous ?) alors même que l'état d'urgence s'impose.

André Gorz a écrit un petit livre "manifeste Utopia" (editions du parangon) qu'on peut trouver sur amazon.fr. Il ne s'agit pas d'un programme d'action ni d'un livre de recettes toutes faites (en tout cas, à mon humble avis ce n'est pas comme ça qu'il devrait être pris) mais un recueil à méditer et un support de discussion pour les repas d'amis ou de famille auquel il fait allusion dans ce billet.

4. Le lundi, 16 mars 2009, 16:16 par Félicien Breton

Merci Merome de ton blog.
Il me semble aussi "qu'être moins con est un préalable essentiel", afin d'éviter de pousser dans le mauvais sens. J'ai fait un site pour ça, pour réfléchir avant d'agir (citoyen.eu.org/).

5. Le dimanche, 22 mars 2009, 03:47 par Chelya

Est-ce qu'on a vraiment encore besoin de se préoccuper de ce que font les députés ? Est-ce que le problème c'est pas plutôt de se placer en consommateur des services de l'état alors que la démocratie c'est d'abord l'action individuelle ?

Vu que ça n'a jamais aussi facile de prendre nous même les choses en main... Pourquoi est-ce qu'on s'embête encore à attendre que quelqu'un d'autre le fasse pour nous ?

Exemple :
www.teeme2008.ee/?op=body...
www.youtube.com/watch?v=A...


" Yes. You're slumped in front of a screen, in the same physical situation as a TV watcher, you've just added a typewriter. And you're "interactive." What does that mean? It does not mean community. It's catatonic schizophrenia. So blah blah blah, communicate communicate, data data data. It doesn't mean anything more than catatonics babbling and drooling in a mental institution. Why can't we stop? How is it that five years ago there were no cell phones, and now everyone needs a cell phone? You can pick up any book by any half-brained post-Marxist jerkoff and read about how capitalism creates false needs. Yet we allow it to go on."

Hakim Bey

Nous ne vivrons pas d'utopies collectives.
Nous arrivons trop tard, le Grand Marché est déjà là.
Nous devons élaborer des stratégies de survie et de contamination, par la prolifération d'utopies privées, cryptées, qui se substitueront à l'ancien ordre social.
Tout ce que je sais, c'est que nous vivons dans un monde dont on ne s'évade pas.

Maurice G. Dantec

Ajouter un commentaire

Les commentaires peuvent être formatés en utilisant une syntaxe wiki simplifiée.

La discussion continue ailleurs

URL de rétrolien : https://merome.net/blog/index.php?trackback/529