"Forcé de jouer un rôle, de plus en plus bancal, dans le plus mauvais des bals, où personne danse ensemble" (Patrick Bruel)

Samedi, je suis allé voir "De l'autre côté du lit", avec Sophie Marceau et Dany Boon. Je suis comme ça, moi, j'aime le cinéma d'auteur, avec de la vraie réflexion sociale dedans.
Bon, le film est plutôt moyen, et blindé de clichés sur le couple, la famille, l'entreprise, mais là n'est pas la question. Ou plutôt si. Sans dévoiler la fabuleuse intrigue du film, sachez qu'il s'agit d'un couple qui décide un beau jour d'échanger de place. La femme à la maison prend la place du mec qui bosse, et le mec se charge des gosses, de la bouffe et des lessives. J'ai dit qu'il y avait plein de clichés déjà ?

Outre l'absence totale de réalisme du film (une femme qui prend la place d'un mec, non mais, franchement, qui peut le croire ?), il y a deux trois petites choses qui m'ont semblées intéressantes, dans le tas, et je ne parle pas des nuisettes de Sophie Marceau dans le film, qui mériteraient à elles seules un article de blog qui serait censuré à coup sûr par ma secrétaire.

Déjà, le film montre que la vie de famille, voire la vie de couple n'est pas conciliable avec la vie professionnelle, ce que je crois de plus en plus. Pas moyen de rentrer à l'heure et d'être tout à fait disponible pour sa famille si on fait correctement son job. Pas plus facile de faire carrière si l'on veut être rentré à l'heure pour faire les devoirs des gosses. Nous jonglons donc tous pour finalement rater l'une et l'autre de nos vies (professionnelle et personnelle), avec l'art du compromis qui nous caractérise.

Ensuite, quand Sophie Marceau prend la place de Dany Boon dans la société qu'il dirige, elle passe par une phase de découragement qui est finement analysée par le coach/huissier qui les guide dans cette échange de viez. Il lui dit : "les managers ressentent souvent un sentiment d'imposture au début". En d'autre mots : tout celui qui se trouve en position de décision ou d'encadrement à un moment donné finit par se demander ce qu'il fout là, et s'il a bien toutes les compétences qu'il devrait avoir pour décider ou encadrer comme il/elle le fait.

J'ai une théorie là-dessus. Et là, je quitte la critique du film pour entrer dans le commentaire de société qui fait le succès interplanétaire de ce blog. Si l'on prend un peu de recul pour analyser ce que chacun de nous fait dans son quotidien professionnel, si l'on observe la chose froidement, comme on le dit souvent : comme le ferait un extra-terrestre qui découvre la Terre, on sent bien comme un truc qui ne tourne pas tout à fait rond.

À la base, l'Homme travaille pour créer de la richesse, et en espérant que cette richesse soit utile. Mais le système s'étant emballé sous l'effet de divers stimuli plus ou moins contrôlés, la plupart d'entre nous est maintenant bien loin de comprendre même l'intérêt de son propre poste dans la société.

Prenez les déplacements et les réunions, et pire que ça : les deux à la fois. Nos autoroutes sont remplies de gens qui vont assister à une réunion à l'autre bout de la France. Nos trains sont blindés de gens qui vont passer une heure ou deux dans une ville plus ou moins voisine pour faire ce qu'il ferait bien mieux au téléphone. Le concept même de réunion est totalement déconnecté de la réalité et improductif. Comme généralement, ce sont parmi les gens les mieux payés qui vont à ce genre de rendez-vous, imaginez les milliers d'euros foutus en l'air chaque jour dans le transport et la tenue des réunions... Et je ne parle pas du CO2 qui s'envole pour rien dans ces conditions.

En ces temps de crise, où les plus grands comptes commencent à crier famine et cherchent à économiser le plus petit centime sur le dos des fournisseurs, ou plus simplement, des ouvriers, combien croyez-vous qui ont fait une croix sur leur réservation 1ère classe, et leurs réunions d'une heure à Paris ? Combien ont pris la distance nécessaire pour s'apercevoir des énormes gâchis de temps et d'argent que représentaient leurs actes pourtant quasi-quotidiens ?

Et si par hasard, tout le monde d'un coup se mettait à se rendre compte de ça, c'est toute une (autre) économie qui s'effondrerait alors, celle des péages autoroutiers, des chambres d'hôtel, des restos, des voitures de loc, des taxis, ...
Le système s'auto-entretient dans sa bêtise non soutenable. Le remettre en cause maintenant serait peut-être bien pire que de se laisser aller doucement au clash.

Alors, comme chaque matin, toi, lecteur de ce blog, et moi, nous allons mettre notre costume de parfait-petit-employé-qui-ne-peut-pas-changer-le-monde-à-lui-tout-seul et jouer la comédie un jour de plus. Jusqu'au générique de fin ?

Commentaires

1. Le mardi, 27 janvier 2009, 12:54 par Marzi

Dans mon entreprise, qui fait partie des "grands comptes touchés par la crise", il y a une véritable restriction des déplacements, complètement nouvelle vu l'ampleur.
Après, discuter de la justesse ou non de ces déplacements par temps normal, c'est un poil plus compliqué que le schéma que tu dresses, même si évidemment, il y a du vrai.

2. Le mardi, 27 janvier 2009, 17:41 par Nath

Pareil que Marzi, restrictions drastiques sur ces déplacements qui coûtent cher ! Faut pas non plus prendre nos patrons pour plus cons qu'ils ne sont !
Mais bon, nous n'avons toujours pas à notre disposition d'outils performants de visio conf ou échanges de docs type netmeeting...
Il faut voir le bon côté des choses, la crise durant, ce sont les habitudes qui vont changer...

3. Le mercredi, 28 janvier 2009, 20:37 par Arnaud

Je suis vraiment d'accord !

j'ai participé à une conférence la semaine dernière. 300 personnes présentes, et des mieux payées, et pourquoi ? pas grand chose !

Enfin, ce n'est pas toujours très simple. Mais on peut effectivement faire quelques efforts et je pense tous autant que nous sommes, nous avons encore le pouvoir de dire NON ! Dans certain cas, il est aussi possible de proposer une alternative, comme dit Nath. La visio conférence est un système qui peut permettre d'énormes économies. Pour 5000 euros on en a un déjà très performant et on peut aussi passer par les systèmes type skype, msn,google talk,... Mais ça c'est une vrai révolution.

Quand on sait que dans certaine entreprise, il y a près d'une voiture de service pour 3 salariés, comment voulez vous changer les choses !

4. Le mercredi, 28 janvier 2009, 22:51 par Stef

Nath : "Pareil que Marzi, restrictions drastiques sur ces déplacements qui coûtent cher ! Faut pas non plus prendre nos patrons pour plus cons qu'ils ne sont !"

Effectivement c'est une bonne "réaction" mais un comportement vraiment intelligent (economiquement et écologiquement) aurait été de le faire avant d'y être contraint. Si on se rend compte que ce n'est pas vraiment nécessaire maintenant, ça ne devait pas l'être avant. ("avant la crise")

5. Le mercredi, 28 janvier 2009, 22:52 par Stef

Tiens je remarque comme ça : la discussion a beaucoup dérivée depuis la nuisette de Sophie.

Dommage.

6. Le jeudi, 29 janvier 2009, 08:04 par Merome
Pour Stef :
7. Le jeudi, 29 janvier 2009, 22:49 par Stef

C'est mon blog préféré ! :)

8. Le mardi, 3 février 2009, 16:48 par Deluxe

je viens de trouver ton blog grâce à un lien chez libé ... pour suivre les autres commentaires, je suis d'accord pour dire que ce serait vraiment bien de limiter les réunions. Mais là où je ne suis pas d'accord, c'est de les remplacer par de la vidéoconférence ou je ne sais pas quel autre artifice électronique. J'ai travaillé un certain temps dans une grande entreprise nationale comme prestataire, et je me suis rendu compte que je passais plus de temps à rendre compte de mon boulot qu'à le faire. c'est de là que vient le gros problème : l'incroyable nombre de gens qui ne bossent pas, mais qui expliquent ce que font les autres, et même de temps en temps qui leur disent ce qu'il faut faire. notre société est en train de crever de ça : il y a plus de décideurs que de gens qui agissent, et pour décider, il faut savoir, d'où toutes ces réunions !

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