Je déclare les plus de quarante-cinq ans inaptes à l'exercice de certaines responsabilités

Pardonnez le ton un peu provocateur du billet qui pourrait heurter la sensibilité des vieux cons cadres expérimentés qui sévissent dans nos belles entreprises.
J'en côtoie certains dans ma vie personnelle et professionnelle, et je discute avec des gens qui en côtoient d'autres et qui font un constat similaire : la plupart sont largués, tant du point de vue technique (dans leur branche) que du point de vue du management de leur équipe.

Ce que je dis là est sans doute transposable à tout changement de génération, et il y a de bonnes chances que je sois moi-même concerné par cette dégénerescence dans une dizaine d'années, si je n'y suis pas déjà. Comme je le signalais déjà dans deux précédents billets (L'auto-citation est un bon moyen de donner du crédit à ce qu'on dit, pour pas cher), la culture des gens a tellement changé en peu de temps, qu'il est pour ainsi dire impossible au personnel encadrant d'un certain âge de suivre le rythme. J'insiste sur le fait que cela touche avant tout les cadres, parce qu'ils ont l'obligation de comprendre les motivations de leurs subalternes pour les manager correctement.

La génération actuelle des cadres sup a grandi dans un monde sans chômage, avec une croissance forte, une prédominance de l'industrie, une valeur-travail omniprésente car tangible. Des années 50 à 70, il suffisait de le vouloir pour trouver un boulot, et lorsque l'entourage familial et social le permettait (accès possible aux études supérieures), travailler plus permettait effectivement de gagner plus.
Parallèlement, le temps consacré aux loisirs et la diversité et richesse de ceux-ci étaient ridicules en regard de ce que nous, trentenaires et plus jeunes avons connus dès notre plus jeune âge.

Cette culture du travail, associée à un matraquage sur des techniques de managements cyniques et paternalistes (orchestré par d'autres cadres sup' avec les mêmes défauts), nous a produit cette armée de vieux chefs totalement à côté de la plaque, dont l'efficacité est inversement proportionnelle au temps qu'ils passent au bureau.
Car, ne leur enlevons pas ça, ils sont bosseurs. Ils sont capables de passer des heures à peaufiner un document inutile jusqu'à la plus petite virgule. Ils n'hésiteront pas à sacrifier leur vie familiale pour tenir la dernière réunion jusqu'à 20h00 vendredi soir pour décider de la couleur et de l'emplacement du logo sur le papier à lettre. Il faut dire que leurs femmes s'occupent du foyer et des enfants pendant ce temps, ce qui leur libère une dizaine d'heures de charges familiales par semaine, au contraire de leur jeunes employés, hommes ou femmes, qui doivent jongler avec.

Quelqu'un qui a vécu dans un tel monde ne peut pas saisir avec précision les tenants et aboutissants de nos propres motivations. Aujourd'hui, la diffusion du dernier épisode de Lost passe avant la couleur du logo. Il est donc hors de question que la réunion dépasse d'une minute. Aujourd'hui, la séance de gym ou la sortie du dernier album de Tokyo Hotel sont plus importants que serrer la main du Directeur ou boucler le budget investissement. Les temps changent.

Je pense qu'on peut attribuer certains succès/échecs du moment à ces hommes et ces femmes qui n'ont juste pas eu le temps de regarder bouger la société, alors qu'ils travaillaient.
The Internet? We are not interested in it disait Bill Gates en 1993. Il est né en 1955, alors que les fondateurs de Google sont nés en 1973 tous les deux...

La misère est que la plupart de nos élus sont de cette génération, et ... ne sont pas prêts de partir en retraite, au contraire des cadres du privé comme du public.

Commentaires

1. Le mercredi, 20 août 2008, 21:37 par Pierre

Hou la la, ça me donne pas envie de revenir Lundi...:-)

2. Le mercredi, 20 août 2008, 22:32 par Filou

Et que dire des profs quinqua qui en plus de leurs certitudes de vieux cons n'ont jamais connus une vraie vie professionnelle. Ils sont censés apprendre aux plus jeunes toute une masse de connaissances de la vie active et professionnelle alors qu'ils n'ont même pas un échantillon sur eux.

Bon pour Tokyo Hotel tu vas loin là quand même... :)

3. Le mercredi, 20 août 2008, 23:53 par Stef

Je prefere aller travailler que d'écouter du Tokyo Hotel, je dois -deja- être un vieux con :)

4. Le jeudi, 21 août 2008, 12:26 par Don

Les meilleurs (ou les + ouverts) ont su s'adapter mérome ;)
Seuls les médiocres (ou étroits d'esprits) restent attachés à des principes de vieux cons.

Et puis ce n'est pas (totalement)leur faute... eux qd ils faisaient 50h par semaine ils étaient récompensés ce qui n'est plus le cas aujourd'hui.
Dans de nombreuses entreprises que tu fasse 35 ou 55 heures/semaine les augmentations restent les même (=0) donc quel intérêt à s'arracher au travail. Et dit toi que ces cadres là doivent gérer ce problème de démotivation et je ne pense pas que cela soit si facile.

Perso moi je peux me passer (ou décaler) bcp de mes activités si on me donne 200€ de + par mois...

5. Le jeudi, 21 août 2008, 13:23 par Marzi

Don : manquerais-tu plus d'argent que de temps ?

6. Le jeudi, 21 août 2008, 13:27 par Don

Pas spécialement : j'aime simplement mon travail...
Mais je ne veut pas me faire exploiter

7. Le jeudi, 21 août 2008, 23:35 par Arnaud

Merome,

Je pense tout d'abord que tu es quelque peu influencé dans ton jugement par le contexte dans lequel tu travailles. structure où la plupart des cadres dont tu parles n'ont connu qu'elle. Ce n'est pas partout pareil.

Je suis d'accord avec la première remarque de Don. seuls les étroits d'esprits ne se remettant jamais en cause et se pensant toujours supérieurs sont de la veine que tu décris.

C'est comme en sport (mince c'est vrai tu ne connais pas ;) ), seulement, là ça se voit tout de suite que tu deviens un vieux con et la remise en cause est immédiate. Pas moyen de faire illusion. Sauf à sacrifier toute une vie et là c'est plus du 24/24 (si le corps veut bien tenir).

Je crois donc que le problème, ce n'est pas de vieillir, c'est simplement d'accepter de changer et de se remettre en cause en permanence ; idem pour les profs Filou, il en existe qui retravaillent leur cours tous les ans mais il est vrai qu'ils ne sont pas nombreux

Pour Pierre, à lundi, pour un café ;)

8. Le vendredi, 22 août 2008, 08:16 par Merome
Arnaud : j'écoute aussi ce que disent les autres, dans d'autres structures, privées ou publiques, et il me semble qu'il y a de fortes similitudes. Et puis, je parle aussi de certaines personnes que nous connaissons tous les deux et qui n'ont pas "connu qu'elle". La panthère rose, par exemple.
9. Le vendredi, 22 août 2008, 10:41 par Arnaud

Est-on sur qu'elle a connu autre chose ? il semblerait que son passé est assez floue.

Sinon, tu parles de la grande maison ? Elle commence à changé, mais je suis d'accord avec toi, c'est en partie son fonctionnement.

Dans le PM, c'est un peu une marque de fabrique, ce que tu avances mais c'est très loin d'être une généralité. On pourrait comparer ton raisonnement au dynamisme de certaines régions ou de certain secteurs d'activités. Je ne pense pas que la démographie puisse expliquer ces différences.

10. Le vendredi, 22 août 2008, 14:01 par Merome
Même en dehors de nos régions, on parlait récemment des gens qu'on avait vus à Nancy, c'était des vrais cas aussi. Bon, c'est peut-être la ville qui veut ça :) Et puis, du côté des élus, Sarko et Ségo me semblent être des exemples assez typiques aussi de cette génération. Bosseurs, sans doute, mais un peu à côté de la plaque quant à la réalité de nos quotidiens.
11. Le mardi, 26 août 2008, 16:10 par 100

Euhhhh c'est qui la panthère rose, la boutique est devenue un zoo :-D

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