Il y a des moments de sa vie qu'on aimerait pouvoir oublier...

Heureusement, je ne me rappelle pas de toutes les comédies que j'ai jouées à mes parents étant petit. Mais certaines, pas forcément les plus importantes, restent en mémoire plus longtemps que d'autres et nous polluent l'esprit plus que de raison.
Je vais essayer de me débarrasser d'un épisode malheureux ici, peut-être que l'extériorisation me fera du bien...

Cela se passait donc il y a fort longtemps, alors que je n'avais encore qu'un chiffre à mon âge, enfin, je ne me rappelle plus exactement. Lors d'une fête patronale dans le village natal de mon père où toute la famille était rassemblée par tradition, un certain nombre de jeux étaient organisés, dont certains pour les enfants comme moi.
En l'occurrence, c'était une course à pied, oh pas grand chose, juste 800 m à tout casser, le temps de faire le tour de deux pâtés de maisons. A cette époque, j'étais encore persuadé que j'étais l'homme le plus rapide de la terre. Il faut dire que j'avais comme unique référence mes camarades de classe (3 ou 4), et dans une seule discipline ou presque : le chat perché. Aucun doute, j'étais le plus vif de tous, l'insaisissable chat qui parvenait toujours à se percher, grâce à d'intelligentes feintes de corps dont j'avais le secret, suivies de sprints à faire pâlir Carl Lewis, même dopé.

Avec une prétention certaine, je m'inscrivis donc à cette épreuve de course, avec de grands espoirs. Ce n'est que plus tard, au collège, que je m'aperçus vraiment de mon niveau réel en sport, toutes disciplines confondues. Je pense que le mot "quiche" est celui qui convenait (et convient toujours) le mieux pour qualifier mes performances. Infoutu de terminé un mille mètres sans rendre mes poumons, je me souviens encore de mon chrono de 6eme : 6'35, après plusieurs arrêts à me tenir les côtes essayant de chasser ce satané point de côté.

Donc à cette époque, je ne savais rien de tout ça, je partis donc au galop dès le coup de sifflet annonçant le départ, confiant et déterminé. Au premier virage, après cent mètres, je m'interrogeai soudain : finalement, était-ce une bonne idée ? Alors que mes concurrents attaquaient déjà le second virage, je cherchais déjà mon souffle au fond de mes chaussettes, et une excuse pour m'arrêter rapidement.
Arrivant finalement à mon point de départ après un tour de pâté de maison, prêt à vomir à triple boyaux, je constatai avec effroi l'étendue du désastre : il fallait faire un autre tour ! Le circuit formait un 8. Je n'avais fait qu'un o. Les tempes prêtes à exploser, j'abandonnai là, en disant que c'était pas du jeu et qu'on m'avait pas prévenu, au grand désespoir de mes parents qui m'encourageaient à continuer.

L'horreur ne s'arrêta pas là. A l'issue de la course, où l'un de mes propres cousins finit en bonne position, le traître, ce fut le moment de remettre les lots.
Un certain nombre de jouets divers avaient été rassemblés pour l'occasion, et dans notre ordre d'arrivée, nous devions choisir tour à tour un objet, celui de notre choix. Nous fûmes donc rangés par ordre d'arrivée, et l'un de mes concurrents, se croyant arrivé dernier (mais après avoir fait les deux tours, lui !), me fit signe de passer devant lui. Il ne savait pas que j'avais abandonné avant lui, mais comme il était gros et que j'avais honte, j'ai pris sa place sans dire mot.
J'avais repéré, dans les lots de seconde zone, puisque je savais que je choisirais parmi les derniers, un assortiment de pâte à modeler de toutes les couleurs qui me faisait terriblement envie. Et bien vous savez quoi ? C'est mon propre cousin qui me l'a pris ! Devant mes yeux tout écarquillé de jalousie et encore rouges de honte !
Voyant mon désarroi, il me dit : "bah choisi un truc bien et on échange". Et il me conseilla par exemple le truc à faire des bulles, indispensable objet qui nous met le prix de l'eau savonneuse à celui du pétrole. J'obéis en me disant qu'effectivement c'était un bon choix et qu'après tout je m'en foutais puisqu'il me filerait sa pâte à modeler ensuite. Mes parents me soufflaient bien de prendre le jeu de carte, sans doute l'objet ayant le plus de valeur dans ceux restants, mais je ne les écoutai point.

De retour chez les grands parents, je rappelai à mon cousin le marché que nous avions conclu. Je lui filai mon truc à bulle, et il me donna sa pâte à modeler. Et là, ce fut le drame. Le petit frère dudit cousin s'était mis dans l'idée qu'il profiterait lui aussi des barres de pâtes à modeler multi-colores. Et il fit donc un scandale public pour récupérer ce que son frère avait si durement gagné à la loyale pendant la course.
Un marché étant ce qu'il est, je courus mettre à l'abri mon lot dans un endroit connu de moi seul. Insistance du petit frère du cousin, qui se plaignit à ses parents (ne jamais faire confiance aux petits). Parents qui se plaignirent aux miens, qui me grondèrent pour révéler l'endroit secret où la pâte à modeler m'attendait.
Et là, ce fut (encore) le drame. Crise totale. Injustice ! Au voleur ! Au secours ! Je commis l'irréparable en avouant publiquement mon attachement inconsidéré pour 5 bouts de trucs de toutes les couleurs, à mon âge, alors qu'un enfant bien moins âgé se les était appropriés auparavant, à la régulière... J'ai montré les pires facettes de mon moi-même de l'époque. Puis j'ai boudé. Et j'en ai voulu à la terre entière. Et ça s'est vu.

Ce n'est toujours pas fini.
Constatant mon engouement soudain pour la sculpture, et le coeur brisé sans doute par mes pleurs de cette fois-là, ma chère mère m'offrit peu après un assortiment de pâte à modeler tout aussi beau que celui-là.
Bien sûr, je n'étais pas plus artiste que sportif, et tout cela finit dans une immonde boule kaki sans queue ni tête, et surtout sans intérêt. Je m'aperçus alors que j'étais devenu bien trop vieux pour apprécier ce type d'activités, enfantillages de maternelle.
Quelque semaines plus tard alors que mon fameux cousin et toute sa famille était invités chez moi, ma tante, qui crut bien faire, m'offrit à son tour un assortiment de pâte à modeler dont je n'avais plus du tout envie. Me rabaissant au niveau déplorable auquel je m'étais exposé publiquement jadis. Humiliation totale. Fin du caprice.

Je ne sais pas s'il m'a servi de leçon, mais cet épisode, pourtant anodin, me reste encore en travers de la gorge. Vraisemblablement parce que je suis coupable de bout en bout, et que je ne peux décidément rejeter la faute sur personne.

Maintenant que je me suis livré en tout impudeur, j'espère bien en retour avoir quelques anecdotes croustillantes de vos caprices passés !

Commentaires

1. Le mercredi, 10 octobre 2007, 21:46 par Cheuz

tu as offert de la pâte à modeler a tes momes? ;op

2. Le vendredi, 12 octobre 2007, 17:26 par Filou

pas de caprices pour moi, j'étais déjà parfait à l'époque :-P

3. Le vendredi, 12 octobre 2007, 21:22 par Calcifer

Pas de caprices dont je me souvienne, je vais tout de même creuser la question.
Par contre dès que tu blogues sur les pires conneries de jeunesse là je suis au point, j'en ai 2 belles !

4. Le mercredi, 31 octobre 2007, 11:22 par Gaille

Mouarff..... :)

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