Un derby, pour les sportivement incultes, c'est quand deux équipes locales s'affrontent, aucune d'elles ne pouvant bénéficier de l'avantage des supporters.

Nous assistons en ce moment à un match que l'on ne peut pas décemment qualifier d'intéressant, mais qui est au moins rigolo. Depuis des années, Sarkozy prépare sa candidature à l'élection présidentielle de 2007. Il a commencé par dire qu'il y pensait en se rasant le matin, il a couru les plateaux de télé alors qu'il était à l'Intérieur sous Raffarin pour montrer qu'il faisait bouger les choses, il a donné son couple en pâture aux journalistes pour faire plus glamour et séduire la ménagère de moins de cinquante ans, et enfin, il se présente aujourd'hui en alternative, en rupture même, d'un gouvernement dont il fait pourtant partie.

Le parcours de De Villepin est tout à fait différent. Parachuté Premier Ministre alors qu'il n'a jamais été confronté au suffrage universel, il est le chouchou de Jacques Chirac et celui qui a conseillé et provoqué la célèbre dissolution qui a valu une cuisante défaite à la droite. Lui n'affiche publiquement aucune ambition présidentielle, mais pourtant elle transpire de son torse musclé.
Ce détail est important. De Villepin est plutôt bel homme. Grand, bronzé, musclé, sportif, ses enfants fréquentent le milieu du mannequinat (et aussi plus récemment la Police). Il a aussi une voix posée et suave, convaincante, qui persuaderait José Bové de planter des OGM dans son jardin, avec force engrais et pesticides. Son plaidoyer contre la guerre en Irak en est la preuve encore vibrante dans nos tympans conquis.

Fort de ce charisme, qui manque cruellement au petit et nerveux Nicolas, il s'impose naturellement comme une nouvelle possibilité à droite. Et comme parmi les supporters actuels de Sarko, beaucoup n'ont fait qu'essayer de détecter le sens du vent ("ce n'est pas la girouette qui tourne, c'est le vent" disait je ne sais plus qui), et n'ont pu que constater, à l'époque, que Sarko était leur ultime chance d'accéder à un pouvoir encore plus aveuglant. Ceux-ci peuvent maintenant se vouer à un autre sein, plus sexy, moins libéral, plus populaire, un truc qui ne salit pas les mains et ne vous grille pas jusqu'à la fin de votre carrière. Une aubaine.

Mais voilà, De Villepin est au pouvoir, et le pouvoir, ça use. Tout érodé qu'il va être, Dominique saura-t-il garder une popularité suffisante pour créer la mini-surprise et se porter lui aussi candidat le moment venu ? Personnellement, je le souhaite. Non pas que je sois pro De Villepin, ni même foncièrement anti-sarko, mais la multiplicité des candidatures à droite est une bonne chose pour la gauche. Même si à gauche, il se passe strictement la même chose.

Pour parvenir à leurs fins, nos deux plus éminents politiciens du moment, vont donc rivaliser de bêtises stratégie, et abuser de leur truquage de chiffres bilan.
Villepin va asseoir son action sur les chiffres du chômage, qu'il va faire baisser, de gré ou de force, coûte que coûte. La réduction du déficit public attendra un peu, il faut faire des réformes qui coûtent du pognon. Tant pis si c'est ce que la droite reproche à la gauche depuis la nuit des temps, là c'est différent : c'est à cause des 35h et de la croissance molle. Faut pas déconner.
Sarko, lui, fera une fois encore mentir les chiffres de la délinquance. Il occultera les 21900 véhicules brûlés en 7 mois, et les balles dans les vitres de la 205 d'un de mes collègues. Il se contentera de rappeler qu'il a été sur tous les fronts, qu'il aura profité de sa présence médiatique pour tenir un discours mi-populiste, mi-provocateur, en le présentant comme une avant première mondiale à laquelle il est seul à avoir pensé.
Remarquez bien que ce n'est pas propre à la droite de tricher sur les chiffres : le PS le fait bien pour le bilan des 35h et le PC pour ses ventes de muguet !

Tout cela est à la fois triste (pour la politique) et amusant (pour le spectacle). En fonction des faits divers, et de la façon qu'auront les deux protagonistes de les traiter, tout peut basculer. Un oeil de Chirac qui flanche et c'est Villepin qui marque des points. Un immeuble qui crame, Sarko sera le premier sur les lieux à en remettre une couche sur l'immigration clandestine (qui, c'est bien connu, est aussi responsable des incendies de forêt dans le Sud de la France).
Observons donc la scène avec circonspection. Et allons vérifier de ce pas ce que veut dire ce mot, parce que personnellement, j'en sais rien du tout !

Commentaires

1. Le jeudi, 22 septembre 2005, 09:45 par marzi

On peut en effet assimilé le combat à droite à un derby.

Et celui à gauche, ca ressemble aux préselections américaines du 100m : plein de gens capables de gagner, bien dur de dire à l'avance qui va gagner, et à chaque fois, des favoris qui se font éliminer.
La bonne nouvelle pour les gens de gauche, c'est que c'est souvent le mec qui arrive à gagner les pré-selections américaines qui finit par être champion olympique.

2. Le jeudi, 22 septembre 2005, 09:53 par Bob

Hier, Fabius a lance le derby a gauche avec le salaire minimum a 1500 euros... Comme quoi ca ne coute pas cher de faire de l'epate en sachant parfaitement que ca ne pourra jamais etre realise. Ca finit par ne meme plus me faire rire.

Si c'est tout ce que la gauche trouve a proposer a son electorat pour 2007, ils ne sont pas pres de remettre pied a l'Elysee.

3. Le jeudi, 22 septembre 2005, 10:31 par marzi

Y'a pire : dans les 5 pré-propositions de programme pour le PS, l'un d'entre elle a comme fer de lance le passage aux 32h.

Je croyais que ce genre d'anerie était réservée aux verts...

4. Le jeudi, 22 septembre 2005, 13:27 par Arnaud

Tout fout le camp, mes bons messieurs

5. Le vendredi, 23 septembre 2005, 08:11 par Bob

Je ne vous le fais pas dire. C'est surement encore un coup des Russes, et il nous faudrait une bonne guerre.

6. Le vendredi, 23 septembre 2005, 08:32 par marzi

Enfin, proposer les 32h, c'est vraiment vivre dans un monde paralléle...

7. Le vendredi, 23 septembre 2005, 09:39 par Merome
Je me fais l'avocat du diable pour énerver Marzi : les 32h, si ce n'est pas une fin en soi, c'est en tout cas un passage obligé pour partager les richesses. Mon avis est qu'il ne faut pas prôner les 32h comme un programme politique, mais que les 32h vont s'imposer à nous dès qu'on aura abandonner l'idée de croissance perpétuelle, ce que je souhaite.
8. Le vendredi, 23 septembre 2005, 11:15 par marzi

La question n'est pas la. LA question est : "proposer les 32h en 2007, ce que fait cette partie du PS, tu es pour ou contre" ?

9. Le vendredi, 23 septembre 2005, 13:49 par Merome
Ni pour ni contre : les 32 heures doivent être une conséquence d'autres changements que je souhaiterais voir mettre en oeuvre. Proposer les 32 heures en conservant l'indicateur "Croissance" n'a pas de sens et donc je suis contre. Changer d'indicateur, ce qui aboutira tôt ou tard à se rendre compte qu'il faut réduire le temps de travail, je suis pour.
10. Le vendredi, 23 septembre 2005, 14:02 par marzi

Ca doit etre pour ca (le coté "je remets tout en cause") que ton pote Apathie précise toujours aux hommes politiques qu'il veut qu'on lui expose une mesure "concrète".

11. Le vendredi, 23 septembre 2005, 16:22 par Pascal

Deux fois la même URL pour deux liens différents :

ses enfants fréquentent le milieu du mannequinat (et aussi plus récemment la Police)


Il occultera les 21900 véhicules brûlés en 7 mois,


----> http: //permanent.nouvelobs.com/societe/20050921.FAP3637.html?1403

12. Le vendredi, 23 septembre 2005, 16:53 par Etheriel

"mais que les 32h vont s'imposer à nous dès qu'on aura abandonner l'idée de croissance perpétuelle": j'attends avec impatience 2042, et le programme du bisounours qui sera secretaire du PS à ce moment là:
Primo: Passage à 0h de travail hebdomadaire sans diminution de salaire
Secundo: Retraite à 30 ans (20 ans pour les fonctionnaires). Ceci dit, à 0h de travail hebdo, l'interet est moindre...
Et tertio: plus d'argent à la fin du mois

13. Le vendredi, 23 septembre 2005, 17:12 par Merome
Pascal : merci, c'est corrigé.
14. Le mercredi, 5 octobre 2005, 10:13 par egdltp

La diminution du temps de travail reflete le fait que pour satisfaire un besoin inchangé, les progrès technologiques font qu'il faut de moins en moins de travail. Si la richesse d'un pays était mesuré non à ce qu'il produit mais sur comment les besoins de TOUS ses habitants sont satisfaits, il y aurait du chamboulement dans la hierarchie.
Mais il faut commencer par lister les besoins et les hierarchiser.
Ne juger que sur la croissance avait du sens dans une économie d'équipements : il faut produire pour que tous aient de quoi, mais nous sommes maintenant dans une économie de renouvellement : il faut remplacer ce qui ne marche plus afin que les besoins soient toujours satisfaits. La meilleur preuve est que le premier but du marketing est de CREER de nouveaux besoins car sans besoins, plus de croissance et le système ne peut plus être piloter. Alors que ce que demandent les gens c'est de pouvoir satisfaire leur besoins, pas d'en avoir de nouveaux qui sont inatteignable en respectant les régles...

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