Je suis en train d'achever la lecture d'un bouquin de Nicolas Hulot. Au deux tiers du livre, je tombe sur ceci :

[...] les âmes sensibles feraient bien de se pencher sur ces formes de cruauté que tout un chacun accepte parce qu'elles revêtent les oripeaux de la pire tradition : la corrida, le cirque, le zoo. Non contents d'empiéter sans cesse sur le territoire des animaux, nous jouons avec eux.

Je commence par m'etonner : la corrida, sans aucun doute. Le cirque, probablement - j'aime beaucoup le cirque mais les numéros d'animaux se ressemblent tous et j'ai bien du mal à m'imaginer que ce soit une vie agréable pour les fauves ou les chevaux. Mais le zoo ? Quand on est défenseur de la cause écologiste comme il l'est, comment s'insurger contre des organismes qui oeuvrent pour la préservation des espèces ? Et puis je me suis rappelé une visite au zoo il y a quelques années.

Ca faisait sans doute plus de dix ans que je n'avais plus mis les pieds dans un zoo. On avait fait une sortie avec ma mère, une de mes soeurs et mon petit neveu ainsi que ma chère et tendre. Au debut c'est l'émerveillement. J'étais (et suis toujours) fasciné par la diversité des espèces engendrées par l'evolution, et voir les animaux "pour de vrai" est décidement plus impressionnant qu'un reportage animalier. Même avec une clôture conséquente au milieu, se retrouver nez à nez avec un tigre a quelques dizaines de centimètres de soi suscite des emotions qui sont difficiles a décrire, et qui rappellent la rencontre avec les gorilles du regretté Douglas Adams. Même l'observation des chiens de prairie suggère, au-delà des apparences, la proximité qui existe réellement entre l'humain et les autres espèces animales.

Le désenchantement commence lorsque je commence a lire les panneaux qui, sur chaque enclos, donnent quelques détails sur les animaux présentés. En voie d'extinction. Né en captivité. Quelques dizaines de specimens restant dans une réserve. Victime du braconnage. Victime du trafic d'espèces protégées. Programme de reproduction en partenariat avec le zoo de telle autre ville, pour essayer de préserver l'espèce. Une bonne moitié des creatures que l'on a sous les yeux n'existeront bientot plus en dehors des parcs zoologiques. Etrange impression d'etre le témoin impuissant de la fin d'une époque. Et puis même si visiblement les animaux sont bien traités, que le parc fait de son mieux avec les moyens qu'il a pour leur donner de la place, une bonne partie est quand même réduite à tourner en rond en attendant le prochain repas, ou le pop-corn lancé par les visiteurs (destiné a cet effet, et que l'on peut acheter a l'entrée - mais comment diable les conservateurs du zoo peuvent-ils s'assurer que les animaux évitent l'overdose de pop-corn ?). C'est un peu le zoo de Vincennes.

Arrive alors le pinacle de l'évolution : il porte un marcel et un bob Ricard. Il a le clope au bec, le portable a la ceinture, le caméscope a la main. Peut-être guette t-il une scène idiote qu'il pourrait filmer et envoyer à Vidéo Gag. Lui, il ne lit pas les panneaux, c'est trop compliqué et de toute facon il s'en fout, il est venu la pour faire une sortie, pas pour voir de la nature. Il appelle les poneys des "bourricots". A son gamin qui lui pose une question, il répond un truc bien à côté de la plaque, et avance en rigolant, fier de sa connerie. Le gamin n'aura de toute facon pas trop le temps de s'interroger sur le bien fondé de la réponse : le père l'engueule pour qu'il avance. Le mégot de la cigarette terminée finira par terre, pas éteint. Tout juste si il ne l'a pas balancé dans un enclos.

Je suis rentré chez moi ce soir-là avec en tête beaucoup de jolies images d'animaux, mais aussi une espèce de déprime bizarre qui me faisait me demander qui, de l'homme ou de l'animal, était réellement du bon côté des barreaux. Au bout du compte, les animaux sont-ils vraiment les premiers bénéficiaires du zoo ? Un lion au coeur de la Moselle : certes ça fait plaisir aux visiteurs, mais en quoi est-ce bon pour le lion ? Si les derniers specimens d'une espèce sont tous en cage, acclimatés, quasiment domestiqués, sont-ils encore réellement les représentants de l'espèce sauvage disparue ?

Pour autant, faut-il abandonner les espèces en voie d'extinction à leur sort ? Evidemment non, mais le zoo est-il la meilleure solution ? Où s'arrête le souci de l'animal, pour faire place au plaisir de l'humain ? Aujourd'hui, même si je crois avoir un peu mieux compris ce que Nicolas Hulot voulait dire, la question me laisse toujours perplexe.

Commentaires

1. Le mercredi, 29 juin 2005, 08:11 par Steh

J'ai toujours trouve que les enclos des zoo etaient trop petit. Tous les jours ils se prelassent au soleil car ils n'ont rien d'auter a faire. Pour certains, ils font parti du spectacle et doivent faire quelques cabrioles pour les visiteurs.
La partie reptile etait encore plus petite. Chaque serpent se trouvent dans un aquarium. Son principal but, dirait-on, c'est de ne pas bouger histoire de ne pas se faire voir des visiteurs. Sur l'aquarium il est ecrit, ne tapez pas sur les vitres. Vu le nombre de visiteurs, je me demande combien de 'tape' sont faites sur ces vitres a la minute...

Il vaut mieux que les animaux se trouvent en 'liberte' dans une zone protegee (et de preference chez eux) et je dirai meme, loin de visiteurs. Mais apres, comment financer ce parc ?!?


2. Le mercredi, 29 juin 2005, 09:04 par Le Monolecte

Salut!

Beaucoup de zoo sont très inadaptés à leurs pensionnaires, ceux des grandes villes sont souvent bien trop exigus pour permettre une vie décente à leurs pensionnaires. Chaque animal a des besoins spécifiques en terme d'espace ou de socialité, besoins rarement satisfait dans les zoos. Quiconque a vu la fosse aux ours du jardin des plantes à Paris sait de quoi je parle (quand on connait les besoins d'un ours, c'est à chialer).

Heureusement, la situation n'est pas aussi désastreuse partout et les interventions d'éthologues (par exemple et au hasard) ont permis de nettement relever les conditions de vie dans certains endroits. Disons, en gros, qu'il faut de l'espace, beaucoup d'espace, aménagé en fonction des besoins spécifiques de chaque animal et donc que la plupart des zoos de centre-ville devraient, selon moi, être fermés et transférés en lointaine périphérie ou en zone rurale.

Parc des Nahuques : www.ethologie.info/photos...
Zoo d'Asson : www.ethologie.info/photos...
Seaquarium : www.ethologie.info/photos...

3. Le lundi, 4 juillet 2005, 22:18 par Arnaud

Nicolas Hulot a raison, n'en déplaise à Bob.
Le zoo n'est pas l'outil de la préservation des espèces ! Il n'est qu'un endroit où on peut venir voir des animaux qui ne sont pas visibles dans nos contrées. C'est un peu comme lorsque l'on exposait dans les foires, les "monstres" de la création (grosses femmes, homme à trois bras et j'en passe...)
Le zoo reste donc un outil de bonne conscience pour l'homme qui se dit que comme il a garder quelques spécimens de chaque espèce (un peu comme Noé), il peut s'en donner à coeur joie sur le reste de la population : déforestation, braconnage, massacre.
Le seul point positif des zoos, c'est de pouvoir permettre à des espèces menacées (qui se reproduisent facilement en captivité) d'augmenter leur population afin de repeupler les habitats naturels.

PS : Je suis allé plusieurs fois au zoo et je vais y retourner car j'aime voir les petits et pour l'éducation des enfants, c'est le plus simple. Tout le monde ne s'appelle pas Nicolas Hulot et a la possibilité de faire le tour du monde pour pouvoir aller admirer des animaux dans leur espace naturel.

4. Le mardi, 5 juillet 2005, 15:14 par Bob

Arnaud, je n'ai pas dit que j'etais specialement en desaccord avec Nicolas Hulot. Je suis meme plutot d'accord avec ce que tu dis - comme je l'ai note, un lion en Moselle a mon avis ce n'est pas super pour le lion.

Une remarque cependant : je ne crois que les projets de repeuplement des habitats naturels soient viables. A priori, si les animaux disparaissent de leurs habitats, c'est que les habitats ne sont plus adaptes a la survie des especes, pour une raison ou une autre : degradation de l'environnement, presence de braconniers, rarefaction des ressources... les facteurs sont aussi nombreux que deprimants.

A partir de la, tenter de reintroduire des specimens plus vraiment sauvages - puisque nes en captivite - dans un environnement qui ne leur etait deja plus adapte au depart, ca ne peut qu'etre voue a l'echec. Un bon exemple de ca, ce sont les tentatives forcenees de reintroduire des ours dans les Pyrenees, avec les resultats qu'on sait.

Peut-etre qu'il va falloir se resoudre a faire notre deuil des especes disparues ou mourantes, pour se consacrer a sauver ce qui peut encore l'etre.

5. Le dimanche, 10 juillet 2005, 00:27 par twix

Encore un sujet interressant. uu Merome, jvais lacher Wargang pour venir ici plus souvent ;-p

Pourtant adepte des zoos et parcs aquatiques, je suis totalement contre çà : (Arnaud) Le seul point positif des zoos, c'est de pouvoir permettre à des espèces menacées (qui se reproduisent facilement en captivité) d'augmenter leur population afin de repeupler les habitats naturels.

euh, là faudrait arreter l'hypocrisie 2 minutes et se rendre compte à l'évidence il s'agit tout simplement d'un problème politique et c'est tout.

Lorsque Merome écrit : Une bonne moitié des creatures que l'on a sous les yeux n'existeront bientot plus en dehors des parcs zoologiques.
Ca revient à dire que d'une façon ou d'une autre ces animaux n'existeront plus quand même. Jsuis pas certain que la 4ème génération de lion de moselle soit très calé dans l'art de la chasse (j'suis d'ailleurs quasiment certain du contraire)
Donc ces fameux animaux, ils servent a quoi, a part amuser les badaux venus payer??
C'est comme le cirque "en plus grand", ou la corrida sauf qu'il n'y a pas de mise a mort à la fin. Mais, malheureusement, ca n'a plus grand chose a voir avec des animaux dignes de ce nom :-/

Comme je le disais, précédemment, on soulève là un problème essentiellement politique.
Des animaux sont en voie de disparition : ok, ils sont où, ca coute combien pour combien d'années pour les garder dans leurs espaces naturels ? Quels moyens mettre en place pour que çà n'arrive plus?
et devant les sommes annoncées la réponse politique est toute simple : oulà, tout çà pour des bêtes, bon on va les ramener chez nous et financer une partie des zoos, le reste sera payer par les gens (qu'on culpabilisera s'ils ne viennent pas), et l'argent qu'on a pas depensé dans cette opération pourra servir à l'achat ou à la construction d'armes, c'est bien plus interressant d'avoir du pouvoir que des animaux sauvés.

Voilà, pour ma part le triste constat que je fais de notre société vis à vis de ces animaux :-(




6. Le lundi, 11 juillet 2005, 11:05 par Merome
Rendons à César ce qui lui appartient : ce n'est pas moi qui ait écrit ce billet, mais Bob, comme l'indique le sous-titre...
7. Le mercredi, 18 janvier 2006, 15:02 par caro

je trouve que ce que tu dit est trés juste et je suis tout à fait d'accord avec toi
j'espere que les personnes qui liront ce que tu as fait se rendrons mieux compte de l'etat de la société dans laquelle nous vivons.
Bises

P.S: j'ai des soucis avec le français alors excuse moi si ce que je dis n'est pas formulé correctement.

8. Le mardi, 24 octobre 2006, 09:54 par patrick

Je suis très intéressé par vos commentaires et heureux de voir autant de passion au sein de vos arguments. Je n'interviens qu'en tant qu'éthologue connaissant bien le fonctionnement des zoos, parcs zoologiques et réserves zoologiques (il faut faire la différence).
Il est exact que certains zoos ne vous présente des animaux dans des conditions plus que moyennes que pour faire des entrées et donc de l'argent. Cependant aujourd'hui c'est une minorité. Les établissements zoologiques ne sont pas uniquement des vitrines d'exposition de spécimens rares. Ils doivent se servir de ces animaux afin de sensibiliser le public aux problèmes actuels de notre société qui mettent en danger plus du tiers des espèces animales et végétales et donc par la même notre survie à long terme. Des programmes pédagogiques sont développés, des actions au sein des écoles,… Il ne suffit pas de remarquer que les animaux disparaissent et que c'est horrible mais il faut aussi se bouger le fondement afin d'y faire quelque chose.

Les parc zoologiques par la reproduction gère les espèces en captivité afin d'avoir assez d'individus à réintroduire dans un avenir plus ou moins proche selon les espèces. Mais en même temps il gère leur génétique afin d'éviter la consanguinité et d'atteindre une variabilité génétique importante à la survie de toute espèce. Et oui, chaque animale a une histoire génétique connue des responsables des espèces au sein des établissements zoologiques. Les échanges entre parcs ne se font pas au hasard mais sont coordonnés par un coordinateur pour chaque espèce en plan de reproduction. Le coordinateur connaît parfaitement tous les individus de son espèce sur un continent et sait quel mâle présenter à quelle femelle pour une meilleure reproduction.

Mais en même temps que le développement de programmes de réintroduction, comme vous l'avez si bien dit, il faut d'abord préserver une nature qui disparaît, il ne sert à rien de réintroduire des individus dans des milieux rendus inadéquat. Rassurez vous, les biologistes, vétérinaires, éthologues, de parcs ne sont pas complètement stupides, ne vous en déplaise, ils y ont également pensé. C'est pourquoi en même temps que mes plans de reproductions mis en œuvre en parcs, ils interviennent activement dans des programmes de conservation dans les pays en cause : protection de milieu, développement de programme d'aide et de développement social des populations locales, création de réserve tout en impliquant et sensibilisant les habitants de ces pays, … j'en passe car ils sont innombrable. Ce n'est que lorsque les milieux sont protégés que les animaux seront réintroduit et avec un suivi très rigoureux…

Mes animaux qui sont réintroduit sont des animaux sanitairement sains (suivi vétérinaires) et comportementalement adapté à la vie sauvage puisque des éthologues ont travaillé à leur réapprendre à se débrouiller comme leurs congénères sauvages. Ce n'est pas toujours facile mais cela marche plus bien lorsqu'on se penche sérieusement sur le problème. Ce sont ce qu'on appel des programmes intégrés qui font intervenir, la politique, la biologie, la science vétérinaire, l'éthologie, le social, …

Voilà entre autre à quoi "jouent" les parcs zoologiques. Je ne comprend pas les gens qui parlent de disparition naturelle des animaux en sachant qu'actuellement la vitesse de disparition de la faune et de la flore est augmenté par 1000 par rapport aux extinctions naturelles et ce à cause de nos activité non réfléchies. Pensons plutôt à ce que nous pouvons faire du point de vue plus écologique pour freiner la décadence de notre environnement ! Cela est-il trop demandé. De plus chaque espèce possède un rôle spécifique dans la chaîne naturelle des chose, ne pas comprendre cela met en danger notre propre subsistance.
Je suis le premier à savoir que certains parcs sont pourris, mais de moins en moins et c'est à vous en ne faisant pas l'amalgame entre tous les zoos de sensibiliser l'opinion sur ces cas heureusement de moins en moins fréquents.

N'hésitez pas à régir...

9. Le jeudi, 14 décembre 2006, 16:08 par eliza

Êtes-vous déjà allé au zoo ?
S'y est-il passé quelque chose ?
Qu'y avez-vous ressenti ?
Avez-vous une histoire à raconter ?

Etudiante en cinéma animalier, je suis en train de réaliser un film sur les petites histoires qui se passent dans les zoos.
Histoires entre animaux-animaux, entre animaux-soigneurs et entre visiteurs-animaux.
Je recherche des personnes qui auraient une histoire, une annecdote à me raconter.
Pouvez-vous m'aider?

Je peux vous donner brièvement des exemples :
- un magot a fait les poches d'une visiteuse et lui a volé un papier. Il s'est avéré que ce papier était un billet gagnant de loterie! Domage!
- une autruche mâle qui ne cherche à s'accoupler qu'avec son soigneur.
- un enfant qui s'est fait voler sa pomme par l'éléphant. Cet enfant pourrait me faire un dessin pour me raconter cet événement, ce qu'il a ressenti.

Je cherche à montrer à travers des histoires personnelles, montrer que la captivité génère de nouveaux comportements. Et cela afin de mettre en valeur l'intelligence et, parfois, l'humour des animaux... et le notre!
Merci de votre participation à mon projet.

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