Quelques réflexions personnelles autour de ça.

L'arrivée d'Alexandre Astier alias @sgtpembry sur twitter n'est pas passée inaperçue : avec plus de 35.000 abonnés en quelques semaines, déjà plus de 800 tweets très personnels, et des dialogues engagés avec plein de gens sur divers sujets, c'est un des comptes les plus intéressants à suivre ces temps-ci.

Parmi les sujets abordés régulièrement avec lui, il y a cette question du piratage et de la rémunération de la création. En tant que vrai geek, on pouvait s'attendre à ce qu'Astier ait une position originale sur la question, mais au final, elle est presque décevante pour ses fans. En effet, il considère le téléchargement comme du vol, et achète tout ce qu'il "consomme" comme films, séries télé, musique...

Bien sûr, c'est plus facile pour lui que pour un smicard de s'acheter tout ce qu'il aime, mais il assure avoir toujours fait comme ça, même endetté jusqu'au cou.
Et l'on comprend que la culture familiale (Alexandre Astier faisant partie d'une famille d'artistes), y est pour beaucoup.

Il reconnaît volontiers que l'offre légale est parfois inadaptée et qu'il a lui-même du mal à trouver sur le marché certains trucs qu'il pourrait télécharger sans problème. Mais jamais il semble ne remettre en cause la globalité du modèle actuel, et argue que le partage n'est pas toujours bon.

A mon sens, le modèle de diffusion et de rémunération actuel des artistes entretient deux formes d'inégalités dont on ne peut pas se contenter :

Inégalité d'accès à la culture
Du côté des "consommateurs-spectateurs", le prix élevé du moindre DVD et du matériel qui va avec rend les œuvres inaccessibles pour beaucoup. On a donc d'un côté ceux qui ont les moyens d'accéder à la culture, de façon massive et quasi sans entrave, et les autres qui devront se contenter de ce qui reste : marché de l'occasion, invendus, ou ce qui passe à la télé (encore que la télé ait aussi un coût).
On pouvait comprendre, peut-être, il y a trente ou quarante ans que la fabrication des supports et leur distribution représentait une part non négligeable du prix de vente final ou en tout cas rendait impossible la copie à moindre coût. Aujourd'hui, tout le monde sait graver un DVD pour un coût négligeable et se rend donc compte de la marge gigantesque qui est faite sur une opération qui n'a rien à voir avec l'artiste et qui ne lui profite d'ailleurs pas.

Inégalité d'accès à la notoriété
Du côté des artistes, cette fois, c'est pareil : des sommes colossales sont dépensées pour la promotion et la diffusion de certains artistes (pas forcément les meilleurs), et rendent inaudibles ou invisibles les autres (pas forcément les moins bons). La richesse de la culture, à mon sens, étant intimement liée avec la diversité d'icelle, il ne me semble pas sain pour le monde du spectacle et du divertissement que des majors décident de ce qu'il est bon ou pas de mettre en avant.
Combien d’œuvres aussi bonnes que Kaamelott n'ont jamais vu le jour faute de producteur/distributeur motivé ? Et à l'inverse combien de merde comme "Scènes de ménage" polluent les ondes ?

Je ne sais pas si quelqu'un (mais en tout cas certainement pas moi) peut proposer un autre modèle viable pour tout le monde, mais celui-ci est rendu moribond par le contexte technico-culturel. Les freins technologiques qu'impose le modèle de diffusion actuel (DRM et autres protections mal foutues) sont tels qu'ils conduisent inévitablement au suicide des artistes.

La fin de Megaupload est l'un des symptômes évidents de ce naufrage lent de la culture populaire aux mains des multinationales. Alors que le site s'apprêtait à lancer une solution très avantageuse pour les artistes, et dépourvue sans doute de toutes les limites techniques antédiluviennes qui empêchent les copies et le partage, les autorités, poussées par les lobbies de l'industrie culturelle (Universal et compagnie), se sont empressées de tout faire fermer, y compris tout ce qu'il y avait de légal voire de professionnel sur les serveurs de Megaupload.

Enfin, pour terminer sur le sujet, je vous invite à visionner ce document important :

Commentaires

1. Le dimanche, 4 mars 2012, 22:03 par toto

lol la vidéo

2. Le lundi, 5 mars 2012, 23:35 par Stef

Tout a fait d'accord avec toi sur les points principaux, le prix de l'accès a la culture pose problème, c'est net. Sortir 15 euros pour un album, quand on sait que l'artiste en touche une infime partie, c'est limite du vol. Et quand on voit que l'argent généré sert a promouvoir de la soupe...

Je fais de la résistance, tant qu'on nous bombarde du "Scène de ménage" et du Lady Gaga (excellente la vidéeo :) ), je continuerai de télécharger.
J'achète ce qui m'a vraiment plu, de temps en temps, pas assez souvent je l'avoue.

3. Le vendredi, 9 mars 2012, 19:59 par Changaco

J'aime beaucoup Kaamelott, d'ailleurs je l'ai téléchargé et partagé en torrent. Je ne l'achèterais probablement pas même si j'en avais les moyens, car ce serait soutenir un système que je critique.

Je suis pour la légalisation du partage des données numériques publiques, pour le revenu de base et contre la licence globale:
http://blog.romainriviere.fr/2011/0...
http://society-forge.org/propositio...

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