Les mal-comprenants

J'observe un truc amusant en ce moment (mais un rien m'amuse) : il y a un paquet de gens bien propres sur eux qui ne comprennent plus rien à ce qu'il se passe. Mais rien de rien.

Prenez les journalistes ou les politiciens, par exemple, ils essaient de catégoriser les indignés de partout. Au début, c'était des jeunes, puis des pauvres, des étudiants, des chômeurs, ... En fait, c'est un peu tout le monde, mais les analystes si prompts à analyser tout et n'importe quoi sur toutes les antennes ont bien du mal cette fois à comprendre le mouvement. Mais qu'est-ce qu'ils veulent à la fin tous ces cons ? sont-ils en train de se dire.

Pareillement, il y a des gens qui ne comprennent pas l'attitude des Grecs. "M'enfin, ils ont profité des crédits pas chers, ils ont voté pour des gens qui les ont foutu dans la mouise, qu'ils payent ! C'est bien de leur faute." Pas moyen de leur faire accepter l'idée qu'à partir d'un certain niveau de foutage de gueule démocratique, de misère et d'inégalités, il n'y a plus rien de tolérable.

Il y a aussi ces gens normaux, jeunes retraités, qui ont traversé les époques sans guerre et sans chômage, qui ont gaspillé les ressources de la planète au rythme de la société de consommation et qui ne comprennent pas qu'un jour, on devra se passer d'avion et de vacances à l'autre bout du monde, que peut-être même, on devra aller moins loin en voiture, moins souvent ou moins vite. Tout ce qui représente le progrès à leurs yeux et qui ne leur semble plus négociable, ils refusent d'en faire leur deuil.

Et tous ces patrons, ces cadres, ces petits chefs qui tombent des nues quand leurs employés s'élèvent, non pas pour demander du pognon mais seulement un peu de considération, de dialogue, du temps pour passer avec leurs enfants, ou pour aller au cinéma.
De leur temps, plus on pouvait bosser et amasser de pognon, mieux c'était. Leur échelle de valeurs personnelles a pour unité l'euro et rien d'autre.

Tous ces gens, donc, d'horizons divers, qui pensaient contrôler parfaitement un monde qui était taillé pour eux, persuadés d'avoir toujours fait les meilleurs choix, ce qui les avait en quelque sorte autoriser à profiter de la vie, ne se rendent pas compte qu'ils l'ont toujours fait au détriment de la planète, de ses ressources, et aux dépends de l'exploité du bout du monde ou de l'étage en-dessous.
L'inconséquence plus ou moins involontaire dont ils ont fait preuve va se retourner contre eux comme un boomerang. Tout la misère du monde va tomber sur leur gueule, des ouvriers qui cousent leur Iphone aux gosses qui montent leurs chaussures, des petites gens qui nettoient leur saleté à ceux qui exécutent leurs ordres, les laissés pour compte de tous les pays vont soudain leur rendre la monnaie de leur pièce, et inventer un monde dans lequel, peut-être, ils seront cette fois totalement inadaptés.

Si je pouvais leur donner un conseil aujourd'hui, ce serait de tomber les œillères que la société, les médias leur a fourni sur-mesure comme des lunettes 3D à l'entrée de la salle de cinéma. The american way of life pour tout le monde, c'était une chimère qui nous a conduit précisément à aujourd'hui. Déchaussons les lunettes et regardons ce que nous avons fait de ce monde, chacun à sa modeste mesure.