Lâcher prise

La vie que je mène est fantastique, mais comme la vôtre sans doute, est assez éprouvante. Dans ce billet, comprenez bien que je n'ai nullement l'intention de me faire plaindre, mais bien de témoigner de la difficulté qu'on a tous pour réguler nos emplois du temps quand manifestement, il y a des choses en trop. En d'autres mots, c'est une énième resucée de "J'ai pas le temps".

Reprenons donc le fil de mes diverses activités, sans ordre particulier : je suis père, mari, informaticien, propriétaire, auteur de trois jeux en ligne, d'un blog, de deux romans et d'une pièce de théâtre, joueur de société moderne, décroissant, et diversement engagé dans quelques causes ici et là. Cela se traduit concrètement par des journées entières à gérer du multi-tasking forcené bien usant.
Et de temps en temps, comme week end dernier, paf, tout éclate en vol d'un coup parce qu'on chope une merde virale, sans gravité aucune, une vieille pharyngite toute miteuse avec un début d'angine bêtement commune, mais qui terrasse la bête jusqu'au fond de son lit.

Pas moyen de fermer l'oeil, car chaque déglutition provoque une douleur à se vriller le cou. Alors, bien sûr, que j'avais déjà plusieurs années lumière de sommeil en retard.
Il faut se rendre à l'évidence, pas moyen d'aller bosser dans ces conditions, je prends donc rendez-vous chez le médecin et en profite pour faire le point pendant une journée de coma profond dans mes draps moites.

Car si la maladie m'atteint, j'en déduis, peut-être à tort, que je lui ai présenté l'une de mes faiblesses. Chaque seconde de ma vie quotidienne étant optimisée au quart de poil, je subodore que le stress et la fatigue ruine mon système immunitaire, par moment.
Mais voilà : comment faire autrement ? Je ne peux décemment pas abandonner sur une aire de repos ma secrétaire et mes trois numéros, les concessionnaires autoroutiers ne méritent toute de même pas ça. J'ai encore besoin de mon métier quelques temps (juste le temps de devenir célèbre et best seller, l'histoire de quelques mois). Ma maison doit être entretenue, les causes que de défends sont justes, et dès que je fais mine de me désengager de mes jeux en ligne en les laissant mourir à petit feu, quelques voix déchirantes s'élèvent sur les forums pour me rappeler les bons moments que j'ai permis au travers de mes créations, et toute la vibrante communauté en appelle à ma raison (s'ils savaient !).
Idem pour ce que j'écris : il suffit que, découragé, il me traverse l'idée de laisser tomber un temps l'écriture, pour que dans les minutes qui suivent un lecteur vienne me supplier de continuer en me disant tout le bien qu'il pense de l'utopie de Greg.

J'ai beau tourner le problème dans tous les sens, le temps n'est pas extensible et les journées ne font que vingt-quatre heures. Je n'ai plus qu'à me confondre en excuses, auprès de ma famille qui récupère les miettes de mon temps disponible, auprès de mes collègues qui subissent mes absences (physiques ou mentales), auprès de mes joueurs qui doivent patienter des lustres avant de voir leurs attentes comblées, auprès de mes lecteurs qui apprécient mon style, qui m'encouragent et même que ça fait drôlement plaisir, auprès de tous ceux que je déçois d'une façon ou d'une autre parce que je n'ai simplement pas le temps.